L’assurance SCOR doit suivre l’exemple d’AXA sur le climat
Après AXA hier, c’est aujourd’hui au tour de SCOR de tenir son Assemblée générale. Les Amis de la Terre y seront pour interroger le réassureur sur sa responsabilité dans le développement du charbon en Pologne et au-delà.
Si SCOR prend l’engagement de ne plus investir dans les 120 entreprises les plus agressives dans le développement de nouvelles centrales à charbon, en s’appuyant sur la Global Coal Exit List, il botte en touche sur sa responsabilité dans la construction de nouvelles centrales et mines de charbon, notamment en Pologne, via ses soutiens en assurance et réassurance.
Concernant ses soutiens au charbon en Pologne via un traité de réassurance auprès de PZU, l’assureur principal du charbon en Pologne, SCOR reconnaît son exposition mais déclare ne pas pouvoir agir, un aveu d’incapacité plutôt inquiétant venant d’un acteur dont le mandat est de protéger en gérant au plus près son exposition aux risques.
Concernant l’ensemble de ses soutiens en assurance et réassurance au charbon partout dans le monde, SCOR refuse de s’aligner avec les meilleures pratiques et continuera donc d’assurer les nouvelles centrales à charbon et les centrales et mines existantes hors lignite. SCOR fait valoir le droit au développement de certains pays, une excuse indécente quand le charbon tue chaque année des milliers de personnes et quand les énergies renouvelables sont désormais aussi voire plus compétitives dans un nombre croissant de pays, y compris dits en développement.
Concernant les assurances et réassurances aux entreprises, SCOR déclare vouloir accompagner la transition et ne pas exclure des entreprises diversifiées, un argument qui ne tient pas quand on sait que de nombreuses entreprises très diversifiées sont toutefois des acteurs majeurs du secteur du charbon et de son développement. De plus, SCOR dit décider d’assurer ou non telle ou telle entreprise en fonction de critères définis dans une grille de notation, mais ceux-ci étant non publics, on est loin d’une attitude responsable.
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Contrairement à AXA, SCOR ne s’est pas encore engagé à ne plus investir dans les entreprises qui développent de nouvelles centrales à charbon. La Fédération française de l’assurance déclarait pourtant l’année dernière prendre acte « de la volonté de ses membres de ne plus investir dans les entreprises qui ne renonceraient pas à leur plan de développement de nouvelles centrales à charbon ». SCOR étant un des membres devrait donc s’engager dans cette dynamique et acter son refus d’investir dans les développeurs de charbon tels que listés dans la Global Coal Exit List. 2
Mais surtout, c’est via ses activités en assurance et réassurance que SCOR joue un rôle clé dans la construction ou la destruction du monde de demain. Comme AXA, SCOR assure le secteur des énergies fossiles. Mais son activité première est de le réassurer, c’est à-dire d’assurer les assureurs premiers entrants sur le marché.
En septembre 2017, SCOR est devenu le premier réassureur mondial à reconnaître la responsabilité spécifique du secteur assurantiel dans les changements climatiques, et à annoncer des restrictions à sa couverture des risques liés au secteur du charbon. Malheureusement, les mesures annoncées restent extrêmement pauvres face à l’urgence climatique.
SCOR annonçait alors ne plus vouloir fournir “d’assurance ou de réassurance facultative qui encouragerait spécifiquement l’exploitation de nouvelles mines de charbon thermique ou de mines et d’usines d’exploitation de lignite”. 3
La première limite évidente est que l’engagement ne concerne ni les centaines de nouvelles centrales encore prévues dans le monde (qui représentent plus de 600 GW, soit environ la totalité des parcs de l’Inde, des Etats-Unis et de l’Union européenne cumulés)4, ni les milliers de mines et de centrales de charbon hors lignite déjà existantes et qui auront toutes besoin de souscrire ou renouveler des contrats d’assurance afin d’entrer ou de se maintenir en opération.
Une deuxième limite, moins évidente pour les non-initiés au monde de l’assurance, est le fait que la réassurance par traité n’est pas non plus couverte par l’engagement. Un “oubli” dont les conséquences peuvent être très lourdes pour le climat et la santé des populations.
C’est notamment via ce type de contrat que SCOR réassure PZU, pilier de l’assurance du charbon en Pologne. En effet, PZU assure plus de 80% des mines de charbon, ainsi que des centrales à charbon couvrant 30% de la capacité de génération d’électricité de la Pologne. En étant l’un des premiers réassureurs de PZU5, SCOR joue donc un rôle clé dans le maintien voire le développement du secteur du charbon polonais, une industrie qui cause déjà la mort prématurée de près de 6000 personnes par an. 6
AXA qui soutient aussi le développement du charbon en Pologne via ses investissements était appelé hier à y mettre un terme. En réponse aux Amis de la Terre, le conseil d’administration d’AXA déclarait qu’un dialogue était prévu avec tous les responsables d’AXA concernés par le sujet avec comme sujet “la fin de leurs soutiens développement du charbon en Pologne, notamment en vue de la COP24”7. C’est ce genre d’engagement qui est aujourd’hui attendu des dirigeants de SCOR aujourd’hui.