L’association « Sauvegarde Berrac » se pourvoit en cassation devant le Conseil d’État contre le Projet de centrale photovoltaïque à Berrac
Communiqué de Presse des associations "Sauvegarde Berrac" et AT du Gers du 27/01/2025
Projet de centrale photovoltaïque à Berrac : l’association Sauvegarde Berrac se pourvoit en cassation devant le Conseil d’État.
Par un jugement rendu le 10 décembre 2024, la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux a validé le projet de centrale agrivoltaïque prévu à Berrac rejetant les arguments de l’association Sauvegarde Berrac.
Deux ans de bataille judiciaire :
La bataille judiciaire autour de ce projet a débuté il y a maintenant deux ans. En janvier 2023, malgré de très nombreux avis défavorables (l’architecte des Bâtiments de France, l’association des maires du Gers, la Dreal, la DDT, la Chambre d’Agriculture du Gers, le commissaire-enquêteur, …) la préfecture du Gers accordait un permis de construire à la société Neoen pour édifier une centrale photovoltaïque aux portes du village. Le dossier prévoit l’implantation du site sur 30 hectares aux abords immédiats du village de Berrac.
« Depuis deux ans, devant l’absence de communication d’un projet élaboré dans le plus grand secret et au profit de quelques-uns, motivés uniquement par la défense de notre village et l’application de la loi, nous luttons contre ce projet intempestif » déclare Michel Wodon, président de l’association Sauvegarde Berrac, « car non content d’être un véritable déni de démocratie, ce projet est également situé au pire endroit possible : à l’entrée du village, à quelques mètres des maisons d’habitation, le long d’une route de crête, de part et d’autre de la principale pour ne pas dire la seule route d’accès au village, en co-visibilté avec le site inscrit (église et cimetière) aux monuments historiques. »
La décision de la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux :
La décision de la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux est pour le moins inattendue. En effet, le rapporteur public de la Cour d’Appel de Bordeaux avait rendu un avis hostile au projet, invitant ses collègues juges à annuler le permis de construire octroyé par le Préfet.
Pour information le rapporteur public est un magistrat qui intervient pour éclairer la formation du jugement. Il prononce à cette fin des conclusions dans lesquelles il expose publiquement, et en toute indépendance, son opinion sur l’affaire qui lui est soumise et la solution qu’il préconise. Le rapporteur public se basait pour ce faire sur la jurisprudence du Conseil d’État estimant que le projet ne permet pas le maintien d’une activité agricole significative.
Comme le confirme Michel Wodon, président de l’association Sauvegarde Berrac : « Par son avis, le rapporteur public de la Cour d’Appel de Bordeaux confirme ce que nous défendons depuis le départ, à savoir que ce projet chimérique de cultures invraisemblables sous lespanneaux n’est qu’un alibi pour l’installation d’une centrale photovoltaïque à l’entrée du village. La décision de la Cour d’Appel de Bordeaux est donc pour le moins déconcertante, car alors que dans 85 % des cas les juges suivent l’avis de leur collègue rapporteur, ils ont ici validé un projet agricole qui a pourtant reçu un avis défavorable de la Chambre d’Agriculture du Gers. C’est abracadabrant, à n’y rien comprendre ! ».
Pourvoi devant le Conseil d’État :
Sur les conseils de leurs avocats, du cabinet Juripublica à Pau, et forts du soutien de l’association Les Amis de la Terre du Gers, partie prenante et soutien des Berracais depuis le début de cette bataille judiciaire, les membres de Sauvegarde Berrac ont donc décidé de se pourvoir en cassation devant le Conseil d’État.
Un pour tous, tous pour quelques-uns …
Une véritable déferlante de projets de centrales photovoltaïques sur des terres agricoles est en ce moment en cours dans le Gers, puisque plus de cent cinquante projets ont été à ce jour répertoriés dans le département par l’association Les Amis de la Terre. Cette vague correspond à une ambition de la Région Occitanie de vouloir être la première région d’Europe « à énergie positive ».
Positive pour qui ?
Sur les 150 projets photovoltaïques sur des terres agricoles identifiés à ce jour, la quasi-totalité est poussée par des multinationales étrangères ou des sociétés parisiennes. Les hectares sont gersois, c’est ici que le soleil brille et que l’électricité est produite, mais toute la valeur ajoutée part à Paris ou à l’étranger.
A titre d’exemple, et cela tombe bien car cela concerne le projet de Berrac, comme le souligne Michel Wodon : « La société privée Neoen, l’énergéticien à l’origine du projet prévu à Berrac, a fait l’objet, en mai 2024, il y a quelques mois donc, d’une OPA pour plus de 6 milliards d’euros par Brookfield, un gestionnaire d’actifs canadien. »
Jean-Manuel Fullana, vice-président de l’association Les Amis de la Terre abonde dans ce sens : « Les quelques « retombées locales » ne sont que les miettes qu’ils consentent à nous laisser. En revanche voici ce qu’ils nous laissent : une artificialisation durable des terres, un impact majeur sur les prix et la disponibilité du foncier, une précarisation et une subordination des paysans, une perte d’autonomie dans les pratiques agricoles, un monde rural déchiré, une dégradation profonde de la qualité de vie et des paysages, un secteur touristique pourtant incontournable de l’économie gersoise fragilisé, … »
C’est donc le pactole pour quelques-uns, les nuisances pour tous les autres.
Le Gers, territoire solidaire, aurait-il oublié le mantra de ses Mousquetaires ?
Carburant pour les extrêmes :
Berrac est historiquement l’un des premiers projets prévus dans le Gers, il est pourtant l’exemple à ne pas suivre. Il cumule en effet tous les travers à ne pas reproduire. L’implantation du projet sur une route de crête, typique de la Lomagne Gersoise, à moins de cinq kilomètres de La Romleu et de sa collégiale, et menant directement à Lectoure, perle de la Toscane gersoise, constituerait une dégradation visuelle majeure pour le village de Berrac, ses habitants et les milliers de locaux ou de touristes de passage chaque année.
Le projet berracais est au demeurant un projet mené sans aucune implication des villageois, avec zéro concertation, au bénéfice d’une clique et dont les retombées attendues pour le village sont quasi inexistantes, et tout à fait disproportionnées par rapport aux nuisances.
Comme le soutient Michel Wodon, président de l’association Sauvegarde Berrac : « Devant le désengagement de la puissance publique, le télescopage des normes et le champ libre laissé au privé, la mise en place et le développement des énergies renouvelables dans le département du Gers s’apparente à un véritable Far West. Ces projets créent de ce fait d’énormes dissensions dans les villages et sapent la confiance des habitants. Ils provoquent crispations, polarisation, radicalisation et sont malheureusement un véritable carburant pour les extrêmes, ce que nous déplorons ! »
Rappel :
Pour rappel, les requérants et l’association Sauvegarde Berrac sont soutenus depuis le début de leur lutte, et pour de multiples raisons, par les personnes, associations ou institutions suivantes, qui toutes ont émis un avis négatif par rapport à ce projet :
– Monsieur Alain Sancerry, représentant de l’association des maires du Gers,
– Madame Clémentine Perez-Sappia, architecte des Bâtiments de France,
– Madame Isabelle Jardin, représentante de la DREAL (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement) Occitanie,
– Monsieur Henri de Seissan de Marignan, représentant de l’Association Vieilles Maisons Françaises,
– Monsieur Michel Uhlman, chef du service Patrimoine & Territoires à la DDT (Direction Départementale des Territoires) du Gers,
– Monsieur François Rivière, représentant les Établissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI), président de la Communauté de Communes Val de Gers,
– Monsieur Gilles de Cleene, représentant de l’association Les Amis des Églises Anciennes du Gers,
– La Chambre d’Agriculture du Gers,
– Monsieur Michel Higoa, commissaire-enquêteur lors de l’enquête publique réalisée à Berrac à l’automne 2022,
– Madame Valérie Chapellière, Monsieur Benoît Lacointa et Monsieur Samuel Coupey, paysagistes,
– Les associations Sites & Monuments, Les Amis de la Terre, la Confédération Paysanne,
– Une grande majorité des habitants de Berrac et des villages avoisinants, non consultés par les porteurs de projet jusqu’à l’enquête publique.