La révolte des stylos usagés au jardin du Département de Côte d’Or
D'ordinaire, lorsque votre stylo-bille n'écrit plus, que l'encre de votre surligneur a séché ou que votre blanc correcteur est vide, le geste évident est de le jeter à la poubelle. Un geste anodin, presque sans conséquences, direz-vous... Mais répété des millions de fois par an, rien qu'en France, cela devient vite un problème !
Des stylos usagés par centaines au Village Zéro déchet
Durant tout le week-end des 2 et 3 juillet 2021, notre mission au Village Zéro déchet, rendez-vous de commerçant.e.s et artisan.e.s locaux organisé sous la houlette du Conseil départemental de Côte d’Or, était d’alerter, éduquer et transmettre de bonnes pratiques de consommation et de mise au rebut des objets auprès de publics divers et variés : groupes scolaires, familles avec enfants, employé.e.s de bureaux, chef.fe.s d’entreprise, retraité.e.s, artistes, responsables administratif.ve.s dans la Fonction publique, etc.
Chacun.e achète, utilise puis jette, à un moment de l’année, des outils d’écriture constitués majoritairement de plastiques et de métaux. Des matériaux qui, une fois évacués nonchalamment parmi nos ordures ménagères, non seulement seront détruits ou rendus inutilisables pour le futur, mais devront en plus être remplacés et donc extraits à nouveau des sols et des sources d’hydrocarbures alors que nos réserves sur la planète s’amenuisent… Ce schéma emprûnté à l’économie linéaire n’est plus une fatalité depuis de nombreuses années puisque les filières de recyclage existent, augmentent leurs capacités de re-production et se spécialisent : c’est notamment le cas pour les stylos-billes, plumes, marqueurs, effaceurs, surligneurs et autres fournitures communément qualifiées “de bureau” ou “scolaire”, grâce à l’entreprise TerraCycle qui a commencé ses premiers programmes de recyclage et solutions zéro-déchet en France en 2011, en partenariat avec diverses grandes entreprises industrielles (BIC d’abord, puis Tassimo, Materne, les biscuits Saint-Michel, Lipton, L’Arbre Vert, Procter & Gamble, et bien d’autres…)
La responsabilité élargie du producteur reste faible
Ces partenariats entre grands producteurs / distributeurs et entreprises de recyclage permettent de combler un minimum le vide législatif en matière de responsabilité partagée autour de la gestion des déchets générés par notre consommation en France et en Europe. Seuls quelques secteurs très spécifiques, les filières REP (responsabilité élargie du producteur), ont aujourd’hui l’obligation de contrôler la récupération, le recyclage et le traitement de leurs produits une fois devenus des déchets, à savoir les DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques), les cartouches d’imprimantes domestiques et toners, les ampoules et tubes néon, les piles et batteries, les médicaments et autres produits phytopharmaceutiques, les DASRI (déchets d’activités de soins à risque infectieux), les bouteilles de gaz, les automobiles et leurs composants, les pneumatiques, les emballages ménagers, les éléments d’ameublement, etc. (liste non exhaustive ; source : Déchets chiffres-clés, édition 2020, ADEME Éditions, sept. 2020)
Loin d’être suffisantes pour lutter contre le gaspillage de ressources, la pollution globale et l’incitation à la surconsommation, les solutions citées précédemment nécessitent donc l’implication de chacun.e d’entre nous pour favoriser la transition de l’économie linéaire à l’économie circulaire. Cela passe notamment par une prise de conscience de notre façon de consommer afin d’adopter de plus en plus naturellement les bons réflexes :
- achat responsable,
- allongement de la durée de vie des objets (réemploi, réparation, réutilisation à d’autres fins)
- réduction et valorisation des déchets (recyclage, compostage, valorisation énergétique…)
Agir sur le cycle de vie des stylos
En pratique, comment réduire son empreinte environnementale tout en s’équipant efficacement en fournitures scolaires et de bureau dont on a besoin pour travailler, créer, correspondre, se divertir, imaginer, produire, etc. ? Selon l’adage consacré, le “meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas.” Cela implique donc de se poser des questions essentielles avant toute nouvelle acquisition (de stylos ou autres) :
- pour quel besoin ? quel usage ?
- comment a-t-il été produit ? avec quelle empreinte environnementale (matières premières, énergie mobilisée, transports, éthique salariale…) ?
- est-il à usage unique ou réutilisable / rechargeable ?
- peut-on le trouver en seconde main / reconditionné / en troc ?
- existe-t-il en vrac, sans emballage superflu (ou, au moins, recyclable) ?
- comment le mettre au rebut une fois hors d’usage ?
Une fois toutes ces interrogations intégrées dans notre processus de consommation, des économies indéniables peuvent être réalisées, et pas seulement pour les ustensiles d’écriture ! Mais poursuivons…
140 milliards de stylo-billes non recyclés
Symbole du gaspillage de ressources et du jetable très bon marché, le fameux stylo-bille inventé par le baron Bich dans les années 1950 a très vite séduit le marché de l’écriture grâce à ses caractéristiques techniques simples mais surtout grâce à son prix de vente. Aujourd’hui, la multinationale française BIC s’est diversifiée et vend des centaines de produits d’écriture, de rasage, d’allumage, etc. à travers le globe, issus de l’industrie pétrochimique principalement. A titre d’exemple, depuis sa création, le célèbre modèle de stylo-bille cristal, de BIC, s’est écoulé à plus de 140 milliards d’unités dans le monde… 99,99% desquelles n’ont jamais été recyclées et se trouvent probablement toujours enfouies dans des décharges ou en attente d’incinération. Et il ne s’agit là que d’un seul article de leurs larges gammes de produits. C’est pourquoi la firme, qui se targue d’avoir gardé 80% de sa production en France et en Europe, s’est lancée avec TerraCycle dans la collecte et le recyclage d’outils d’écriture en plastique afin de les transformer en petits mobiliers urbains et autres accessoires de plein air, entre autres.
Mais avant même de penser au recyclage, n’oublions pas d’allonger la durée de vie des stylos en les rechargeant : de nos jours, la plupart des modèles grand public comme le BIC Cristal, mais aussi les Frixion de Pilot, les marqueurs, les surligneurs de Stabilo ou autres, pour ne citer que les plus connus, proposent des recharges à la vente, souvent conditionnés par dizaines plutôt qu’à l’unité (pour limiter les emballages encore une fois) et parfois compatibles avec des marques distributeur ou objets promotionnels.
Enfin, acquérir tous ces produits sans se faire influencer par les annonces publicitaires manipulatrices est certes un parcours semé d’embûches, mais les filières de recyclerie et de seconde main sont une bonne alternative à la profusion de modèles, de formes, de couleurs et de fausses promesses des grandes surfaces ou des sites marchands. Les tarifs défient toute concurrence puisque les produits ont déjà été (un peu) utilisés, voire simplement déballés et oubliés…
Plus d’informations sur stylos21.org
Pour aller plus loin et découvrir les données précises et chiffrées concernant la consommation de fournitures scolaires, ainsi que les points de collecte déjà répertoriés dans l’agglomération dijonnaise et en Côte d’Or, suivez le lien ci-après.