Dire « LES » agriculteurs, c’est aussi idiot que dire « LES » commerçants. Quand on dit « LES » commerçants, est-ce qu’on parle du petit épicier du village ou des actionnaires d’Amazon ? Même chose lorsqu’on dit LES agriculteurs. Il n’y a rien de commun entre un petit éleveur ou producteur de lait et ces agri-managers, les yeux fixés sur les cours des matières premières agricoles à la bourse de Chicago. On ne parle pas du même métier, ce ne sont pas les mêmes conditions de vie et ce ne sont pas les mêmes fins de mois !! Arrêtons de parler DES agriculteurs !

Le secteur agricole reçoit 9 milliards d’€ par an de la Politique Agricole Commune. A cela il faut ajouter toutes les aides nationales directes, les défiscalisations et toutes les aides régionales, départementales, etc… L’agriculture est probablement le secteur économique le plus soutenu par actif, mais malgré ces sommes considérables le bilan social est catastrophique. Près de 20% des agriculteurs et agricultrices sont sous le seuil de pauvreté. C’est un scandale qui dure depuis des années !

Où passe l’argent ?

Ces énormes sommes engraissent en amont les multinationales du machinisme agricole, de la chimie et des semences, les grandes « coopératives », les banques et fonds d’investissement qui spéculent sur le foncier et en aval les grands négociants qui fixent les prix mondiaux et les géants de la distribution. Et ceux qui rendent tout cela possible, ce sont les barons de la Beauce et autres grands céréaliers et agri-managers qui se remplissent les poches au détriment des petits. Tout ce beau monde a tout intérêt à ce que ne rien ne change et que le robinet d’argent public continue à couler à grands flots dans leurs comptes en banque…

Alors quand l’opinion publique n’accepte plus la pollution des eaux, la perte de la biodiversité par exemple, quoi de mieux que de profiter de la misère ou des difficultés de la majorité de la profession pour riposter ? On attise bien les troupes et on envoie en avant ces petits agriculteurs crier leur colère et pour certains leur désespoir. On indique le bouc-émissaire – l’écologie et les écologistes – et on détourne ainsi la colère des vrais fauteurs de troubles.

Nos instances dirigeantes ne sont que trop contentes d’accéder aux demandes de LA profession. Car sous prétexte d’aider les plus défavorisés, elles continuent à favoriser les agri-managers, les multinationales, les grandes coopératives et l’agrobusiness en général. Tant qu’il y aura encore un dollar ou un euro à gagner, le complexe agro-industriel et financier fera tout pour maintenir le plus longtemps possible un modèle agricole à bout de souffle. Qu’importe si la casse sociale est déjà terrible et le sera encore plus dans les années qui viennent et qu’importe les conséquences écologiques et sanitaires si ça leur rapporte !

Et pas de problème, si les demandes de la société se font plus pressantes, ils organiseront la prochaine vague de protestations dans un an ou dans deux ans…

L’agriculture a besoin de la société et la société a besoin de l’agriculture.

Nous devons être plus forts que tous ceux qui essayent de creuser un fossé entre nous. Oui, il y a des problèmes, mais on ne les résoudra pas en nous montant les uns contre les autres. Nous devons nous mettre autour d’une table et travailler ensemble dans l’intérêt général. Personne ne dit que ce sera facile, mais nous n’avons pas le choix surtout face à la crise écologique et climatique qui rend déjà l’exercice de la profession agricole et notre avenir à tous et toutes de plus en plus difficile et incertain. Alors au boulot !

source : http://amisdelaterre40.fr/