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Groupe localLes Amis de la Terre Drôme16 mars 2025

Mais où est-donc passée la loi « Anti Fast-Fashion » ?

Votée il y a un an à l'Assemblée nationale, la loi « anti fast-fashion » n'est jamais parvenue jusqu'au Sénat. Ce texte est pourtant crucial. Dans le cadre d’une mobilisation nationale, le 14 mars, nous étions à Valence pour sensibiliser les passants aux méfaits de cette « mode jetable » et les inviter à interpeller le gouvernement.

En ce vendredi 14 mars, un collectif de 11 associations (dont Les Amis de la Terre) s’est mobilisé au niveau national, sous la bannière « STOP Fast-Fashion ». Le but de cette mobilisation : interpeller le gouvernement et le Sénat pour que la loi contre la fast-fashion, votée il y a un an à l’Assemblée nationale, soit enfin examinée et définitivement adoptée.

Pourquoi la loi contre la fast-fashion est-elle indispensable ?

La fast-fashion désigne un ensemble de marques qui produisent très vite, en grande quantité et pour pas cher. Elles renouvellent rapidement leurs collections et utilisent des stratégies marketing agressives. Cette évolution du secteur de l’habillement, alliant augmentation des volumes et politique de prix toujours plus bas, a modifié les habitudes d’achat des consommateurs, en créant chez eux des pulsions d’achat et un besoin constant de renouvellement qui sont lourds de conséquence. La fast-fashion est en effet nocive à plusieurs titres :

  • Pour des raisons environnementales : Aujourd’hui, l’industrie de la mode est responsable de près de 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (26 % en 2050, si nous continuons sur cette même trajectoire) et de 20 % de la pollution de l’eau. À cause de l’utilisation croissante de fibres synthétiques, cette industrie est aussi responsable de 35% des rejets de microfibres plastiques dans les cours d’eau et les océans, qui impactent toutes les chaînes alimentaires jusqu’à notre assiette. Quant à la filière des déchets du textile, elle est en crise du fait d’un trop-plein (progression de 10% en seulement 4 ans).
  • Pour des raisons sociales : aujourd’hui 70 % des vêtements vendus en France sont fabriqués en Asie du Sud-Est où des ouvrières (parfois même des enfants) sont exploitées dans des conditions insalubres, en contrepartie de salaires indignes. Parallèlement, depuis les années 90, on assiste à la mise en liquidation judiciaire d’un grand nombre d’entreprises françaises dans le secteur de l’habillement et du textile. Ce sont pas moins de 300 000 emplois qui ont été perdus.

Aujourd’hui, la situation est loin de s’arranger. Etant donné les coûts pratiqués de plus en plus bas, la consommation de vêtements ne fait que s’accélérer. En France en 2022, 3,3 milliards de vêtements se sont vendus (en moyenne 48 vêtements par habitant.e par an), soit près de 38% de plus qu’il y a 10 ans ! Alors que nos placards débordent ainsi de vêtements, c’est l’environnement qui passe à la caisse, sans compter les milliers de salariés qui sont surexploités à l’autre bout du monde et les nombreuses fermetures d’enseignes françaises.

Qui plus est, cette explosion des volumes de vêtements produits s’accompagne d’une baisse notable de leur qualité. On estime que leur durée d’usage a été divisée par deux. La ressourcerie de Livron-sur-Drôme, qui reçoit jusqu’à une tonne par mois de vêtements destinés à être revendus ou recyclés, constate ce phénomène de dégradation qui les rend de moins en moins réutilisables.

Que vise la loi « anti fast-fashion » ?

Il y a un an, le 14 mars 2024, une loi a été votée à l’Assemblée nationale pour limiter la production de vêtements. Le texte prévoit notamment l’interdiction de faire de la publicité pour ceux qui sont issus de la fast-fashion, ainsi qu’un malus pour compenser l’impact environnemental (il pourrait atteindre jusqu’à 10 euros par produit en 2030).

Malheureusement, après la dissolution de l’Assemblée nationale et l’immobilisme institutionnel qui s’en est suivi, cette loi est restée à l’arrêt. De quoi laisser le temps au lobby de la fast-fashion de s’organiser et d’épaissir ses rangs. Par exemple, la marque chinoise Shein (plus de 7200 nouveaux modèles par jour) a progressivement professionnalisé ses apparitions dans les médias et son lobbying auprès des pouvoirs publics en embauchant par exemple l’ancien ministre de l’intérieur Christophe Castaner. Alors que les frontières entre la défense de l’intérêt général et celle des intérêts privés sont ainsi brouillées, il est fort probable que le retard dans l’examen de la loi au Sénat ne soit pas qu’une simple coïncidence…

La mobilisation des Amis de la Terre Drôme

Face à cette situation, le collectif « Stop Fast-Fashion » a lancé une journée de mobilisation nationale pour mettre la pression sur le Sénat et le Gouvernement, afin que la proposition de loi votée il y a un an soit enfin prise en compte. Les Amis de la Terre Drôme ont participé à cet évènement.

Le matin, nous avons commencé notre action par un tractage devant le lycée Camille Vernet de Valence, afin de sensibiliser les lycéens. Puis, nous avons mené une action près de la fontaine monumentale de Valence avec le soutien d’Esther Bouix, la coordinatrice textile de L’Astucerie, la ressourcerie de Livron-sur-Drôme. L’objectif était d’alerter les Valentinois sur les conséquences néfastes de la fast-fashion. Nous avons déposé des dizaines de T-shirts et de pantalons à côté de la fontaine. La scène a inévitablement attiré le regard des passants !

https://www.francebleu.fr/infos/environnement/un-collectif-anti-fast-fashion-interpelle-le-senat-a-valence-6644466

https://revue21.fr/article/christophe-castaner-shein-fast-fashion/