9 juillet 2024

Après avoir frôlé le pire, restons mobilisé⸱es face à l’extrême droite

Les résultats de dimanche soir ont sonné comme un immense soulagement, alors que tous les sondages prédisaient le pire. Mais ces résultats ne sont qu’un répit. L’extrême-droite et ses idées n’ont jamais été aussi fortes et nous devons donc maintenir la mobilisation pour les contrer sur le long terme.

Un sursaut citoyen et humaniste…

182 sièges pour le Nouveau Front populaire, 168 sièges pour Ensemble, 143 sièges pour le Rassemblement national (RN) et ses alliés. Malgré des sondages prédisant une majorité possiblement absolue puis relative pour le RN à l’Assemblée, qui aurait entraîné des conséquences dévastatrices, les résultats de dimanche soir sont un immense soulagement.

L’extrême-droite est arrivée en troisième position, derrière l’union des forces de gauche et le camp présidentiel. Cela a été possible grâce à une union rapide des partis de gauche dès l’annonce de la dissolution, au front républicain – bien qu’en partie ébranlé – pour faire barrage à l’extrême-droite au deuxième tour, et à une forte participation citoyenne (66,63%, la plus forte participation à un second tour d’élections législatives depuis 19971). Mais ces résultats sont surtout le fruit d’une mobilisation inédite et soutenue d’organisations et figures de la société civile alliées à des médias pendant quatre semaines, mobilisation à laquelle les Amis de la Terre France ont pris activement part.

Dimanche, les Français⸱es ont refusé de se faire gouverner par le Rassemblement national et son monde. Dimanche, les Français⸱es ont rappelé que le racisme, la haine et le rejet de l’autre, l’aggravation des inégalités et la fuite en avant sur la dégradation des écosystèmes naturels n’étaient pas la France.

… Mais un danger plus menaçant que jamais

Néanmoins, crier victoire serait une grave erreur. Avec ses plus de 10 millions de votes dimanche, le raz-de-marée RN existe bel et bien, et l’extrême-droite peut se targuer d’un score historique aux élections législatives. Après 8 député⸱es RN en 2017, puis 89 en 2022, ce sont 143 député⸱es RN qui occupent désormais un siège à l’Assemblée. Cela implique aussi que ce parti disposera d’importants financements qui lui permettront de se renforcer et se structurer davantage.

Mais surtout, dans cette France fracturée, les idées d’extrême-droite sont terriblement banalisées. En témoigne l’explosion des agressions racistes et homophobes depuis les résultats des élections européennes et lors de l’entre-deux-tours des élections législatives2.

Bien loin de la dédiabolisation, pendant cette campagne, le RN s’est distingué comme un parti ouvertement xénophobe, raciste, fasciste et sexiste.

Le “ras-le-bol” d’une France paupérisée est par ailleurs omniprésent. La politique néolibérale et souvent méprisante d’Emmanuel Macron et son gouvernement a servi de marchepied à la montée en puissance de l’extrême-droite ces dernières années, à coups de réformes anti-sociales telles que la baisse des APL ou le recul de l’âge de départ à la retraite. La confiance des Français⸱es en leurs représentant⸱es politiques est en chute libre, et si les citoyen⸱nes ont toutes les raisons de réclamer un changement radical, ne nous trompons pas de cible.

À coup sûr, un gouvernement d’extrême-droite aurait été dramatique, tant pour la justice sociale, que pour les droits des femmes, des personnes racisées et LGBTQIA+, et pour la préservation de l’environnement et du climat. Partout dans le monde, des Etats-Unis à la Hongrie, en passant par la Russie ou le Brésil, nos collègues des Amis de la Terre ont témoigné des dangers de l’extrême-droite au pouvoir. Pour nombre d’entre nous, le vote de dimanche signifiait bien plus qu’un bulletin dans une urne. Il recouvrait des enjeux vitaux : le droit à vivre dignement sur le sol français, le droit à se déplacer librement sans risquer de se faire agresser pour sa couleur de peau, son genre ou son orientation sexuelle, mais également la préservation des droits fondamentaux et des libertés publiques et associatives. 

Pas de retour à la normale

Après le soulagement et le répit, il n’est pas question d’un retour à la normale. Bien au contraire, place à la bataille culturelle et à la résistance sur le terrain, partout en France. À l’issue de plusieurs semaines de campagnes électorales européennes et législatives ayant totalement éclipsé l’écologie du débat public, et ce malgré l’impératif d’urgence, nous serons plus que jamais mobilisé⸱es pour que cette question soit à l’agenda politique.

Après un score du RN encore une fois historique, les Amis de la Terre, en tant qu’organisation de la société civile et association écologiste, auront un rôle immense à jouer dans la lutte contre la propagation des idées d’extrême-droite, pour nouer du dialogue et travailler à la concrétisation d’avenirs désirables. Notre écologie est humaniste, notre écologie se bat contre les injustices, pour l’égalité de toutes et tous devant la loi, et pour la liberté et la solidarité entre les peuples. C’est pourquoi, partout et toujours, en créant et en soutenant des réseaux de résistance, les Amis de la Terre s’érigeront contre les idées, les discours et les actes racistes, xénophobes et identitaires.

Marie Cohuet

Suite au sursis accordé dimanche soir, il est vital que le futur gouvernement mette en oeuvre un programme de justice sociale et environnementale et fasse honneur à l’éveil citoyen dont les Français⸱es ont fait preuve, afin que l’arrivée de l’extrême-droite au pouvoir que l’on vient d’éviter n’advienne pas en 2025 ou en 2027. Le scénario du pire ne doit pas être une fatalité.

Marie Cohuet
Co-Présidente des Amis de la Terre France

En élisant un nombre important de députées du Nouveau Front populaire, dont le programme était le plus en mesure de répondre à l’urgence sociale et écologique, les Françaises ont fait entendre le besoin de mesures progressistes pour répondre aux multiples crises et injustices qui affectent notre société. Nous appelons le Nouveau Front populaire à assumer ses responsabilités et à être à la hauteur de ces attentes, en restant uni et en mettant en œuvre les mesures promises.

La lutte ne fait que commencer

En tant qu’association de la société civile œuvrant pour la protection de l’environnement et des droits humains, nous continuerons d’agir en contre-pouvoir, comme nous l’avons toujours fait. Nous maintiendrons la pression sur les décideurs politiques, afin d’obtenir la mise en place de mesures réellement ambitieuses pour la préservation des écosystèmes et pour la justice sociale, dans la lignée du modèle des sociétés soutenables. Dès maintenant et plus que jamais, mobilisons, résistons, transformons !

Publication
Couverture du manifeste
Guide citoyen

Manifeste Pour des sociétés soutenables