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AgricultureFinance
12 octobre 2017

Au milieu de tout ça… il y a les paysan-ne-s !

L’année 2008 fut marquée par des émeutes de la faim dans une quarantaine de pays et plusieurs gouvernements furent renversés. Cette crise « agricole » majeure fut provoquée par l’accélération du programme d’éthanol de maïs des États-Unis.

Des dizaines de millions de tonnes de maïs étaient détournées du marché alimentaire vers les voitures.  Cela provoqua de fortes augmentations des prix alimentaires et une hausse brutale des cours mondiaux des céréales. S’en sont suivies une spéculation effrénée sur les matières premières et une ruée sur les terres agricoles. 10 ans plus tard, qu’avons-nous appris, retenu, mis en place pour éviter que l’histoire ne se répète ?

Alors que les bouleversements climatiques continuent de déstabiliser la production agricole de nombreuses régions du monde, les causes de la crise de 2008 s’aggravent. Nous assistons à un accaparement des terres massif par des États (Chine, Arabie Saoudite, etc.) cherchant à assurer, au delà de leurs frontières, l’approvisionnement alimentaire de leurs populations. De grandes entreprises industrielles ou financières, des banques, des assurances, des fonds de pensions… continuent de spéculer à outrance !

D’immenses intérêts se sont notamment concentrés autour des engrais, des pesticides et des semences. Les géants de la chimie et des biotechnologies projettent de nouvelles fusions qui donneront naissance à des empires financiers et industriels colossaux.

Quelques géants du négoce international contrôlent les ventes des produits alimentaires, et la spéculation sur les cours agricoles bat son plein.

La terre fait l’objet de la convoitise de nouveaux secteurs – agrocarburants, biochimie verte, finance verte – et attire les géants de l’énergie, de l’automobile ou de l’aéronautique et bien sûr le secteur financier.

Des groupes financiers et industriels toujours plus puissants contrôlent en aval la distribution des produits alimentaires aux quatre coins de la planète.

Tous ces puissants groupes multinationaux sont très actifs dans la rédaction des traités de libre-échange et se garantissent des droits exorbitants. Par exemple, tout État qui renforcerait des normes alimentaires ou sanitaires pour protéger ses citoyen·ne·s ou l’environnement pourrait se voir accuser d’ériger de nouveaux obstacles au libre-échange et être condamné à payer de très lourdes sommes en compensation.

Au milieu de cette chaîne, il y a le maillon faible : LES PAYSAN·NE·S. Elles et ils subissent toutes ces pressions en amont et en aval. Dans tous les secteurs agricoles et partout dans le monde, il n’est question que de concentration, industrialisation, financiarisation et artificialisation des moyens de production agricole.

Ces opérations industrielles et financières ont pour but de conquérir et contrôler de nouveaux secteurs de la biosphère et d’engranger les profits. Elles sont systématiquement présentées aux citoyen·ne·s du Nord comme des mesures de lutte contre les changements climatiques et la faim, ou en faveur de l’environnement (OGM, agrocarburants, etc.). Dans de nombreux pays du Sud,
les gouvernements ne font même pas semblant. Ils servent souvent de bras armés des multinationales ou ferment les yeux lorsqu’une répression brutale s’abat sur les militant·e·s paysan·ne·s et écologistes en toute impunité.

Le complexe agro-industriel et financier mondial accélère la destruction de nombreux écosystèmes, des équilibres écologiques et de la biodiversité. Il est aussi l’un des principaux secteur émetteur de gaz à effets de serre. Il participe puissamment à l’aggravation des dérèglements climatiques.

Malgré ce constat inquiétant, il y a des raisons d’être OPTIMISTES : jamais dans le monde il n’y a eu autant de luttes locales, nationales ou internationales pour diminuer le pouvoir de ces empires agro industriels et financiers destructeurs. Jamais autant de citoyen·ne·s ne se sont levé·e·s pour défendre une agriculture paysanne et familiale qui refroidit la planète, nourrit les humains et respecte l’environnement.

Nous sommes d’autant plus OPTIMISTES que nous savons que les alternatives à cette folie destructrice existent comme nous le montrons avec quelques exemples. Alors luttons pour une agriculture qui nourrisse les humains et contre un complexe agro-industriel et financier qui n’engraisse que les multinationales et leurs lobbies.

Martine Laplante et Christian Berdot pour les Amis de la Terre France.

Crédit photo : Ernanio Mandlate / KISAI / ActionAid