Comment la sobriété choisie permet de reprendre le pouvoir sur nos vies
6 astuces pour limiter votre consommation d'énergie cet hiver (et les suivants)
L’été a été terriblement chaud, l’hiver se présente glacial. La guerre en Ukraine a entraîné une hausse massive des prix du gaz, et avec eux, des prix de toutes les énergies pour les entreprises, les collectivités et les ménages. Malgré le « bouclier tarifaire » mis en place pour l’électricité et le gaz, nos factures ont augmenté, et cela se poursuivra dans les années à venir. Pire, le black-out électrique est un risque à ne pas sous-estimer. Ne peut-on vraiment rien y faire ? Le gouvernement nous exhorte à placer tous nos efforts dans les « petits gestes ». Pourquoi pas, mais seront-ils suffisants ? Non ! Voilà quelques astuces personnelles et collectives qui permettront de limiter la facture cet hiver, tout en préparant un changement de système.
Le saviez-vous ? En France, les 10% les plus riches émettent en moyenne 24,7 tonnes de CO2 par habitant, contre 5 tonnes pour la moitié la moins riche1. C’est donc aux ménages les plus aisés de montrer l’exemple !
Attention, spoiler : ces petits gestes pour réduire notre consommation ne suffiront pas pour sauver le monde ! Faites comme vous pouvez, en fonction de vos priorités et de vos possibilités.
L’action collective ou individuelle ? Les deux !
Collectivement, les Amis de la Terre militent pour une politique ambitieuse de rénovation énergétique avec une priorité aux personnes précaires, dans une logique de faire des économies sur toutes les dépenses somptuaires (des jets privés à l’affichage publicitaire, pour ne prendre que quelques exemples) et stopper les incitations à la surconsommation. Nous nous battons pour réorienter les ressources dans la bonne direction, en taxant les superprofits par exemple. Ce qui n’empêche pas que beaucoup d’entre nous peuvent, et doivent, agir à l’échelle individuelle. Cela concrétise et rend tangible le changement de système, tout en explorant les limites de l’action individuelle – des éco-gestes aux grands choix de la vie – face à la nécessaire mise en place de politiques publiques efficaces (transports en commun et services publics, isolation thermique des bâtiments, politique énergétique, modèle agricole…). Quand on sait l’urgence de baisser nos émissions de gaz à effet de serre le plus vite possible, il est clair que le moindre geste compte. Nous le faisons pour limiter les déchets, pour rendre notre alimentation plus soutenable ou pour changer notre façon de nous déplacer. Il est possible de faire beaucoup mieux que les « petits gestes » et de rechercher là aussi une vraie sobriété : nécessaire, juste et heureuse.
Moins, c’est mieux : la sobriété, nécessaire, juste et heureuse
1. Bien mesurer ses usages
Parfois, on a du mal à savoir où part l’énergie qu’on achète, comment elle est dépensée. Sans devenir maniaque du compteur, il est toujours utile de bien identifier ses usages : qu’est-ce qui consomme de l’électricité ? Du gaz ? Quels sont les ordres de grandeur à avoir en tête et les appareils à surveiller en priorité ?
Dans un logement, la principale source de consommation d’énergie est le chauffage (on en reparle un peu plus loin). Mais il y a aussi l’eau chaude. Sans surprise, nous vous invitons à préférer les douches aux bains, ainsi qu’à baisser le débit de la douche.
Vos appareils électriques et électroniques sont aussi de gros consommateurs d’énergie2. Voici quelques conseils et coups de pouce pour devenir un as de la sobriété : régler la température de votre congélateur et de votre réfrigérateur, ne pas remplacer votre sèche-linge et préférer un étendoir, moduler votre usage de la TV, ou encore éteindre votre box internet lorsque vous n’êtes pas dans votre logement. En effet, même si cela semble négligeable, les appareils en veille ou allumés inutilement consomment plus qu’on ne le croit ! Prendre l’habitude de les éteindre permettrait de réduire de 14% des consommations domestiques selon les propositions de NégaWatt.
Prendre conscience de sa consommation énergétique, c’est reprendre un peu de contrôle sur sa vie, pour mieux comprendre (et changer) tout le système qui nous entoure !
2. Limiter les courants d’air
Dans un logement, le froid ou la sensation de froid peuvent provenir de courants d’air. Faites la chasse aux trous inopportuns ! Quand il fait froid dehors, un simple passage de la main permet d’identifier comment le froid passe par les bords de la porte. Premières suspectes, les portes d’entrée de maison ou d’appartement sont fréquemment en cause. Cela peut se résoudre en installant un joint sur le cadre et un bas de porte. Si votre boîte aux lettres est intégrée directement dans votre porte d’entrée, assurez-vous que sa fermeture soit bien hermétique.
Les fenêtres constituent une autre importante source de courants d’air. Menuiseries anciennes ou mal installées… Joints silicone et mousse expansive seront vos meilleurs amis. Cela dit, veillez à faire en sorte que le logement reste ventilé un minimum, pour éviter que l’air ne se charge en humidité. De plus, une aération quotidienne est recommandée (à un moment où le chauffage est éteint).
3. Adapter son logement sans travaux lourds
Au-delà des courants d’air, quelques petits ajustements peuvent améliorer considérablement la sensation de bien-être dans votre logement et vous offriront une douce ambiance « cocon » ! Tout d’abord, disposer un grand tapis sur un carrelage ou un parquet limite la sensation de froid. Par ailleurs, si vos fenêtres sont mal isolées et que vous ne pouvez pas faire de travaux, fermer les volets extérieurs ou installer des rideaux bien épais suffisamment près des vitres permet de réguler la sensation de froid dans le logement. Une autre solution peut être de poser des sur-vitrages, ou encore d’augmenter l’isolation thermique de vos fenêtres grâce à un film transparent 3.
4. Chauffer les personnes, pas les espaces
Les températures dites « de consigne », recommandées par l’ADEME, sont actuellement de 19° dans les pièces à vivre et 17° dans les autres (chambres, cuisine)4. Elles sont assez arbitraires : pour certaines personnes, dans certains logements, elles sont trop basses pour être confortables et dans de nombreuses passoires thermiques, elles sont inatteignables sans se ruiner. Mais souvent, c’est surtout une question d’habitudes à prendre. D’après Négawatt, baisser les températures de 1° à 2°C permettrait d’économiser 8 à 16 % des consommations de chauffage ! Quand on le peut et que notre logement le permet, baisser la température du chauffage voire ne pas l’allumer est une option à creuser : il est tout à fait possible de vivre confortablement dans un logement à 16°C. Une initiative wallonne appelée Slow Heat donne de nombreuses pistes et tente de démonter certaines idées reçues. Le principe est simple : chauffer les personnes, pas les espaces. Cela passe par l’habillement, bien sûr. Au-delà des cols roulés de Bruno Le Maire et de la doudoune d’Elisabeth Borne, certaines pratiques de nos anciens méritent d’être remises au goût du jour (mention spéciale aux nostalgiques de la bonne vieille paire de charentaises), tout comme les bouillottes et les couvertures chauffantes.
5. Rénover son logement et exiger une politique publique ambitieuse
Les astuces listées ci-dessus, parfois non applicables ou applicables seulement provisoirement, ne sont qu’une partie de la solution. N’oublions pas que beaucoup reste à faire à l’échelle politique et collective pour faire face au dérèglement climatique ! En effet, la solution la plus efficace reste de rénover l’isolation des logements.
Si vous êtes propriétaire de votre logement, il est temps de le rénover thermiquement. Il existe déjà des aides et personnes pour vous conseiller dans cette démarche. Mais que faire si vous n’êtes pas propriétaire de votre logement, ou si malgré les aides (insuffisantes) de l’État ou des collectivités locales, vous n’avez pas les moyens de rénover votre propriété ? Avec d’autres associations, nous demandons un plan ambitieux pour rénover les passoires énergétiques en France, 1 Français·e sur 5 étant concerné·e par la précarité énergétique5. Malgré les ambitions affichées, les mesures gouvernementales ne sont pas à la hauteur : doté de 2,5 milliards d’euros par an, le dispositif Ma Prime Rénov ne permettrait de rénover de manière performante que quelques milliers de foyers6. Le gouvernement est prêt à dépenser 45 milliards d’euros pour alléger la facture énergétique à court-terme7. La preuve que l’argent public est là ! Mais il doit être mobilisé pour un véritable service public de la rénovation thermique.
6. Adhérer aux Amis de la Terre France
Rejoignez notre combat pour le développement des énergies renouvelables, l’efficacité énergétique et un vrai changement de système !
Vous pouvez vous référer à des valeurs moyennes, comme dans ce graphique, page 8. Des outils génériques sont aussi disponibles pour calculer vos dépenses énergétiques (ce tableur par exemple). Si vous avez un peu de temps, vous pouvez mesurer les consommations réelles de vos usages, grâce à une prise électrique spéciale (appelée wattmètre), ou en regardant la puissance théorique de chaque appareil et en la multipliant par le temps d’utilisation.
« Se chauffer à 19°C » : d’où vient la recommandation gouvernementale en pleine crise énergétique?, Le Monde, 5 octobre 2022
Comment mieux se chauffer ?, infographie de l’ADEME
Crise énergétique : l’exécutif débloque 45 milliards d’euros pour prolonger le bouclier tarifaire, Le Monde, 14 septembre 2022