Business as usual au Fonds Vert qui accrédite le Crédit Agricole
Mercredi 9 mars - Après Deutsche Bank en 2015, le Fonds Vert vient d'accréditer le Crédit Agricole et HSBC à gérer les fonds collectés pour aider les pays du Sud à faire face aux impacts des changements climatiques.
Une décision critiquée par les ONG qui appelaient le Conseil du Fonds à rejeter leurs demandes et qui éloigne un peu plus cette institution de ses objectifs initiaux (1).
Bien que la logique veuille que le peu de ressources publiques serve dans leur totalité les intérêts des populations le plus dans le besoin, et non ceux de banques privées les plus puissantes au monde, l’accréditation du HSBC et Crédit Agricole, décidée le mercredi 9 mars par le Conseil du Fonds Vert, n’est pas très surprenante même si très décevante. Car le Fonds Vert pour le Climat a montré un biais en faveur des grandes institutions internationales depuis sa création.
Car ce sont aujourd’hui la Société financière internationale de la Banque mondiale, la Banque européenne d’investissement et la Banque africaine de développement qui ont également été accréditées pour gérer les fonds collectés par le Fonds Vert. Alors que le Fonds Vert avait été créé comme une alternative aux banques multilatérales de développement, toutes sont aujourd’hui ses partenaires officiels.
Et l’accréditation de banques commerciales telles que Deutsche Bank l’année dernière et HSBC et Crédit Agricole aujourd’hui aideront encore moins à faire du Fonds Vert un moteur du renforcement des capacités des pays en développement et un levier de financement pour les petits projets d’atténuation des impacts des changements climatique, projets peu attractifs pour les acteurs privés habitués à financer des projets rentables et d’envergure.
Et alors que l’accréditation d’institutions de pays du Sud est souvent refusée ou minorée, on ne peut que relever le double standard du Conseil au profit de grandes institutions et au détriment de la légitimité et crédibilité du Fonds tout juste né. Car on imaginerait mal des établissements de pays en développement avec un passif aussi mauvais en termes de scandales financiers et violations des droits humains comme HSBC et Crédit Agricole être accrédités. Et aujourd’hui encore, on a assisté avec une claire démonstration de ce double standard avec le déclassement de grand à petit de la taille des projets qu’une entité éthiopienne (Ministère des Finances et de la Coopération économique de l’Ethiopie, MOFED) pouvait gérer sous motif qu’elle n’avait pas de lignes directrices en matière sociale et environnementale. Certes, de telles politiques existent au Crédit Agricole et à HSBC… sur le papier.
Le troisième processus d’accréditation a renforcé la captation de l’extrême majorité des ressources du Fonds par les institutions internationales dominantes, mais la contestation de la société civile aura toutefois permis de générer un débat avec les membres du Conseil concernant le suivi des accréditations des grandes banques commerciales. Si on note le silence affligeant de la France, pourtant toujours présidente de la COP21, sur la question des financements aux énergies fossiles des deux banques, on salue la Suède ainsi que l’Allemagne, les Pays-Bas, la Norvège, et le Royaume-Uni pour avoir relevé cette incohérence de demander à des banques qui financent les changements climatiques de gérer des fonds dédiés au climat.
Pour finir, le Fonds suivra l’évolution des activités des deux banques en vue de la réévaluation de leur accréditation dans 5 ans. Au-delà du respect de mesures anti-fraude ou blanchiment d’argent, il est demandé aux banques d’aligner leurs activités avec la transition vers une économie bas carbone, et résiliente aux changements climatiques.
Pour les Amis de la Terre, cela doit commencer par mettre un terme à tout financement pour des nouveaux projets de centrales à charbon partout dans le monde et à tout soutien aux entreprises qui développent de nouveaux projets de mines, centrales ou infrastructures de charbon ainsi qu’à celles actives dans l’achat et la vente de charbon sur les marchés internationaux.
(1) Voir le communiqué de presse qui appelait le Fonds Vert à rejeter les demandes d’accréditation du Crédit Agricole et d’HSBC.