Climat : François Hollande va-t-il reculer sur sa promesse de supprimer les soutiens publics au charbon ?
Dans une note communiquée au gouvernement, les ONG françaises dénoncent un possible report à 2020 (au plus tôt) de l’engagement phare du Président de la République sur la fin des soutiens publics de la France au charbon. Elles s’alarment de voir que certaines options actuellement sur la table videraient même l’engagement de son contenu. Elles rappellent enfin l’importance climatique et politique, moins de cinq mois avant la COP21, d’une application immédiate de l’annonce du chef de l’Etat sur le charbon.
Risques de rétropédalage sur l’engagement présidentiel sur le charbon
« Moins de 5 mois avant qu’elle n’accueille le sommet international le plus important du quinquennat de François Hollande, la France pourrait revenir en arrière sur l’annonce emblématique du Président de la République de mettre fin aux soutiens publics de la France au charbon, via l’agence française de crédits exports. Pour la société civile, un retour en arrière, comme le laissent présager les scénarios actuellement étudiés par le gouvernement, serait inadmissible. Il ébranlerait durablement la crédibilité et l’exemplarité de la France dans son rôle de présidente de la COP21 », rappelle Lucie Pinson, chargée de campagne Finance privée / Coface aux Amis de la Terre France.
Une large part du marché mondial du charbon serait exemptée de cette décision
« Presque tous les régimes d’exemption proposés par le gouvernement permettraient de continuer à octroyer des garanties publiques pour les exportations de centrales à charbon vers les plus gros marchés mondiaux, notamment l’Inde (39% du marché mondial hors Chine). Opter pour l’un de ces régimes reviendrait à reporter l’annonce présidentielle à 2020, voire 2030. La France aurait alors une politique en matière de crédits export encore moins ambitieuse que l’Allemagne, pays qui est pourtant loin d’être exemplaire sur le charbon. La parole du président de la République ne peut être ainsi bafouée », explique Isabelle Laudon, responsable Politiques publiques au WWF France.
L’incompatibilité fondamentale du charbon avec la préservation du climat
« L’engagement de François Hollande, annoncé à la Conférence environnementale, visait à répondre à l’urgence climatique. Or même les technologies de centrales à charbon plus efficaces demeurent très émettrices de gaz à effet de serre et incompatibles avec le respect du seuil de 2°C d’élévation de la température. Avant la COP21, la France doit impérativement réorienter ses soutiens publics vers les énergies renouvelables », rappelle Armelle Le Comte, chargée de plaidoyer Climat et énergies fossiles à Oxfam France.
Une proposition française taillée sur mesure pour Alstom
« Sans le dire clairement, les exemptions proposées par le gouvernement sont taillées sur mesure pour l’industriel Alstom, unique bénéficiaire des garanties à l’export de la France pour le charbon. Ses lobbyistes n’ont pas chômé ; Alstom veut continuer à recevoir des soutiens publics pour l’exportation de ses centrales au charbon polluantes vers des pays comme l’Indonésie, le Vietnam, l’Inde, la Thaïlande ou l’Afrique du Sud – justement ceux qui pourraient faire l’objet d’exemptions. Alstom n’a pas encore pris le tournant de la transition énergétique », note Célia Gautier, Responsable des politiques européennes au Réseau Action Climat France.
Non, le charbon n’est pas une solution à la précarité énergétique au Sud
« Le charbon n’est pas une réponse à la précarité énergétique dans les pays du Sud. D’après Carbon Tracker Initiative, les énergies renouvelables deviennent moins chères que le charbon dans la plupart des pays en développement. C’est le cas en Afrique du Sud, où la Coface a garanti deux énormes centrales – Kusile et Medupi. De plus, dans les zones rurales qui sont les plus concernées, les coûts de construction d’infrastructures de charbon et de rattachement au réseau sont prohibitifs. Il est bien moins coûteux de construire des systèmes décentralisés d’énergies renouvelables », détaille Matthieu Orphelin, porte-parole de la Fondation Nicolas Hulot.
Un chantage à l’emploi totalement infondé
« La note communiquée par le gouvernement présuppose d’emblée, sans aucune preuve, que des emplois chez Alstom sont directement menacés par l’application de la décision du Président de la République. Puisque la note s’intéresse aux emplois d’Alstom, elle aurait dû élargir le champ de l’analyse à l’ensemble des métiers de l’entreprise, dont une grande partie bénéficie de la transition énergétique française et mondiale, par exemple dans les énergies renouvelables. Alstom produit déjà plus de renouvelables que de charbon », conclut Benoît Hartmann, porte-parole de France Nature Environnement.
Contact presse :
- Simon Coquillaud, Responsable communication, Réseau Action Climat France, simon@rac-f.org, +33 1 80 89 99 55
- Pierre Sagot, Chargé de communication, Les Amis de la Terre, communication@amisdelaterre.org, +33 6 86 41 53 43
- Marielle Chaumien, Chargée de communication, WWF France, mchaumien@wwf.fr, +33 6 15 39 24 95
- Matthieu Orphelin, Porte-parole, Fondation Nicolas Hulot, m.orphelin@fnh.org, +33 6 37 36 83 41
- Benoît Hartmann, Porte-parole, France Nature Environnement, porteparolefne@gmail.com, +33 6 87 70 41 07