De l’eldorado gazier mozambicain au chaos, révélations sur la complicité de la France
Un nouveau rapport des Amis de la Terre France, Mozambique et International dénonce les intérêts français dans les méga-projets gaziers en cours de développement au large du Mozambique.
Dans une région en proie à un conflit qui s’envenime, l’exploitation du gaz tourne déjà au cauchemar pour les populations de Cabo Delgado. Entre corruption, militarisation, aggravation des dérèglements climatiques et violations des droits humains, le rapport décrypte le rôle de la France dans une affaire qui a démarré en 2013 au détour d’un scandale de corruption lié à un contrat naval, et s’étend jusqu’à la signature du plus gros investissement jamais réalisé en Afrique subsaharienne ce mois-ci 1 .
De l’eldorado gazier au chaos, quand la France pousse le Mozambique dans le piège du gaz
En janvier 2020, Emmanuel Macron déclarait devant la Convention Citoyenne pour le Climat, que « la difficulté qu’on aura collectivement, c’est d’expliquer à des pays pauvres qui découvrent des gisements, comment il va falloir se passer de ces hydrocarbures. […] Par exemple, le Mozambique découvre qu’il a de formidables gisements dans ses eaux territoriales. […] Il va falloir trouver des compensations dans l’économie internationale pour les aider à en sortir et les rendre moins dépendants de cela. » 2 . Contrairement aux déclarations du Président de la République, le rapport détaille comment les pouvoirs publics français se sont activés depuis plusieurs années pour que les industriels du gaz, de l’armement et leurs banquiers profitent de l’eldorado gazier à 60 milliards de dollars au Mozambique, contribuant ainsi à enfoncer le pays dans la dépendance aux énergies fossiles. C’est un véritable scandale d’Etat que les Amis de la Terre révèlent au fil du rapport, mêlant diplomatie économique, financements publics, ventes d’armes, coopération militaire et corruption. Le tout dans une région en proie à un conflit qui s’envenime et a déjà fait au moins 1 100 morts depuis octobre 2017.
La France est bien décidée à assurer que cet eldorado gazier profite en premier lieu à “ses” multinationales, quitte à semer le chaos et amorcer une bombe climatique représentant sept années de ses émissions de gaz à effet de serre.
« Enliser la planète entière un peu plus dans la crise climatique, attiser les tensions dans une région qui s’embrase, se rendre complice de pratiques de corruption et de violations de droits humains : rien ne semble inquiéter le gouvernement, ni Total et ses banquiers. » poursuit Cécile Marchand.
« L’industrie fossile colporte un mensonge selon lequel le gaz serait une énergie de transition. Notre expérience de cette prétendue transition au Mozambique est plutôt celle de la liberté vers les violations des humains, de la paix vers le conflit, des communautés vivant de l’agriculture et de la pêche vers des populations affamées privées de leurs moyens de subsistance. La ruée vers le gaz, aggravant la crise climatique et ne profitant qu’aux multinationales et élites corrompues, doit cesser. » complète Anabela Lemos, directrice de Justiça Ambiental (Les Amis de la Terre Mozambique).
Les Amis de la Terre appellent le gouvernement français à mettre un point d’arrêt à la diplomatie du chaos, au service des industriels des énergies fossiles et de l’armement, en commençant par cesser de leur octroyer des aides publiques à l’exportation. Au vu de la gravité des violations des droits humains, des risques environnementaux et climatiques, ils somment les entreprises françaises impliquées – banques privées comme Crédit agricole et Société Générale, industriels de l’énergie comme Total – de se retirer des projets gaziers au large du Mozambique et de renoncer à tout développement de nouveaux projets.