EDF assigné en justice pour ses activités au Mexique
Le géant de l'énergie Electricité de France (EDF) prévoit de construire un parc éolien sur les terres de la communauté autochtone mexicaine d’Unión Hidalgo, située dans l’Etat d’Oaxaca.
Jusqu’à présent, le droit de communauté de donner son consentement sur ce projet n’a pas été respecté, entraînant une polarisation importante et l’escalade de la violence envers les défenseurs des droits humains. C’est pourquoi, aujourd’hui, des représentants d’Unión Hidalgo, de l’organisation mexicaine de défense des droits humains ProDESC et du Centre européen pour les droits constitutionnels et humains (ECCHR) assignent EDF devant le tribunal judiciaire de Paris, demandant à l’entreprise de respecter leurs droits et de suspendre le projet de parc éolien jusqu’à ce qu’elle se conforme à son obligation de vigilance, telle que prévue par la loi sur le devoir de vigilance adoptée en 2017.
Le CCFD-Terre Solidaire, Sherpa, les Amis de la Terre France, qui plaident pour l’adoption de législations contraignantes relatives au respect des droits humains et de l’environnement par les entreprises, ainsi que l’Observatoire pour la Protection des Défenseurs des Droits de l’Homme, SOMO, OECD Watch et l’alliance FGG, soutiennent les représentants d’Union Hidalgo, ProDESC et ECCHR dans cette démarche. Maîtres Julie Février et Hanna Rajbenbach représentent les membres de la communauté Unión Hidalgo et les associations ECCHR et ProDESC devant les tribunaux francais.
“Notre terre ancestrale nous appartient et nous avons le droit, en tant que communauté, de décider de son utilisation. EDF s’est immiscé dans la prise de décision au sein de notre communauté. Cette interférence d’EDF a même entraîné des divisions et des conflits violents au sein de la communauté. Les personnes qui ont émis des critiques vis-à-vis du projet – les défenseurs des droits humains et du droit à la terre – ont été menacées, attaquées, criminalisées. Nous demandons à EDF de suspendre le projet tant qu’aucune consultation libre et préalable n’ait eu lieu et que nous ayons – ou non – donné notre consentement au projet”, déclare Mme Guadalupe Ramirez, représentante de la communauté Unión Hidalgo.
Les projets d’infrastructure de grande envergure implantés sur les territoires autochtones doivent respecter les droits humains, et en particulier le droit au consentement libre, informé et préalable (CLIP). Les communautés autochtones sont souvent victimes de discrimination et privées de leurs droits. La constitution mexicaine et le droit international leur garantissent le droit d’être consultées si un projet est prévu sur leurs terres. En conséquence, les responsables du projet – l’État et les entreprises concernées – doivent s’assurer que les processus de consultation sont équitables, à l’abri de toute pression ou manipulation indue. Ceci requiert également de s’assurer que les participants à ces consultations, et les défenseurs des droits notamment, soient à l’abri de toute intimidation, harcèlement ou violence.
“La loi française sur le devoir de vigilance impose aux entreprises d’identifier les risques de violation des droits humains résultant de ses activités commerciales. Si de tels risques sont identifiés, elles doivent prendre des mesures propres à atténuer ces risques et à prévenir les atteintes graves aux droits humains. EDF poursuit la planification de son projet Gunaa Sicarú alors même que de graves violations des droits humains en découlent pour Union Hidalgo. EDF doit maintenant se conformer à son obligation de vigilance. Si elle n’est pas en mesure d’atténuer ces risques, le projet Gunaa Sicaru devrait être annulé”, explique Cannelle Lavite, juriste contentieux au ECCHR.
Guillermo Torres, avocat senior à ProDESC, ajoute : “Il est important que l’entreprise cesse de négocier des contrats d’usufruit sur les terres et des permis de production d’électricité pour les besoins de son projet sans avoir obtenu le consentement libre, informé et préalable de la communauté. En interférant avec la libre consultation et en offrant des bénéfices individuels aux seuls partisans du projet, EDF et ses filiales mexicaines ont provoqué une escalade de la violence à Unión Hidalgo. En conséquence, les attaques et les menaces contre les défenseurs des droits de humains et du droit à la terre se multiplient.”
“L’État mexicain doit garantir les droits des peuples autochtones. En tant qu’entreprise soumise à la loi sur le devoir de vigilance EDF est tenue de veiller à ce que ces droits soient respectés dans toutes les opérations qu’elle mène via ses filiales et partenaires commerciaux. Planter des éoliennes n’exonère pas de respecter les droits humains”, déclare Swann Bommier, chargé de plaidoyer au CCFD-Terre Solidaire.