Forêt
Communiqué de presse30 août 2010

L’Union européenne et ses agrocarburants provoquent une ruée sur les terres africaines

Le rapport que les Amis de la Terre / Friends of the Earth publient aujourd’hui montre les conséquences funestes de la politique « Agrocarburants » de l’Union européenne.

Pour satisfaire ses besoins, l’UE provoque une vraie ruée sur l’Afrique où des étendues toujours plus vastes de terres sont confisquées aux populations locales. Le phénomène échappe à tout contrôle et est largement sous-estimé (1).

Le rapport « Afrique : terre(s) de toutes les convoitises » examine la situation de onze pays de ce continent. Il en ressort que 4,5 millions d’ha de terres – soit la surface du Danemark – sont sur le point d’être acquis par des investisseurs étrangers afin de produire des agrocarburants destinés essentiellement au marché européen.

Cette pratique appelée « accaparement des terres » est de plus en plus répandue et dominée par des compagnies européennes. Mais comme les informations officielles publiques sur la dimension réelle de ce problème restent très rares, les chiffres disponibles ne reflètent que très partiellement la réalité et sont de toute évidence largement sous-estimés.

Le rapport Afrique : terre(s) de toutes les convoitises révèle à la fois comment les populations locales sont dépossédées de leurs terres et le peu de moyens dont elles disposent pour faire valoir leurs droits. Des zones de forêts et de végétation naturelle sont défrichées et les agrocarburants entrent en concurrence avec les cultures vivrières pour les terres cultivables.

Selon l’étude, si l’Union européenne maintient son objectif de 10 % d’énergie renouvelable dans les transports – essentiellement des agrocarburants – d’ici 2020, il faudra encore beaucoup plus de terres.

Pour Adrian Bebb, coordinateur de la campagne « Alimentation et agriculture » des Amis de la Terre Europe : « Les firmes européennes sont en train de faire main basse sur des terres partout en Afrique, menaçant la subsistance des populations locales et leur environnement, dans le seul but de satisfaire l’appétit insatiable de l’Europe pour les agrocarburants. Quand l’Europe cessera-t-elle sa politique en faveur des agrocarburants, pour enfin investir dans une agriculture respectueuse des peuples et de l’environnement et s’attaquer sérieusement au gaspillage énergétique causé par nos transports ? »

Un rapport de la Banque mondiale obtenu par une fuite (2) confirme cette tendance. On peut y lire que « les consultations avec les populations locales sont très faibles… Les conflits sont chose commune et portent habituellement sur le foncier ». La Banque Mondiale a refusé jusqu’à maintenant de rendre public ce rapport controversé.

Les premières protestations ont eu lieu en Tanzanie, à Madagascar et au Ghana suite à l’accaparement de terres par des compagnies étrangères.

Pour Mariann Bassey, coordinatrice de la campagne Alimentation et agriculture des Amis de la Terre Nigeria (Environmental Rights Action) : « L’expansion des agrocarburants sur notre continent transforme les forêts et les zones naturelles en cultures énergétiques. Les terres destinées à l’agriculture vivrière sont prises aux populations locales. Nous exigeons de vrais investissements dans l’agriculture afin de pouvoir nourrir les Africains et non alimenter les moteurs de véhicules européens

Selon Christian Berdot, référent de la campagne Agrocarburants des Amis de la Terre France, « Avec ce rapport, nous voyons bien le rôle central que joue la demande européenne en agrocarburants dans l’accaparement des terres en Afrique. Il est révoltant de voir les firmes européennes s’abattre sur l’Afrique comme un nuage de criquets, confisquant des millions d’hectares à des communautés déjà démunies, dans le seul but de faire rouler des autos et des camions en Europe. Les agrocarburants sont une tragique illustration de la surconsommation européenne de ressources mondiales. »

Les Amis de la Terre demandent à l’Union européenne et à ses États membres de mesurer et diminuer leur consommation de terres, d’eau, de matières premières et leurs émissions de gaz à effet de serre, partout dans le monde.

Notes :

[1] Lire le rapport ci-dessus.

2] Financial Times (27 July 2010) [http://www.ft.com/cms/s/0/62890172-99a8-11df-a852-00144feab49a.html