La Banque européenne du climat : illusion verte ou réelle transformation de la BEI ?
Un nouveau rapport publié par la coalition d'ONG Counter Balance démontre que la Banque Européenne d’Investissement (BEI) est encore loin d’être la “Banque européenne du climat" comme l’appelait de ses voeux Emmanuel Macron en mars 2019.
Tandis que le bras armé financier de l’Union européenne s’est engagé à aligner toutes ses opérations avec l’Accord de Paris d’ici fin 2020 et qu’il est au cœur des plans de relance de l’économie, les ONG critiquent notamment les investissements néfastes de la banque dans le secteur des transports et les aides publiques apportées sans condition aux entreprises polluantes.
La BEI prévoit de devenir la “Banque européenne pour le climat” 1 et d’aligner toutes ses opérations avec les objectifs de l’Accord de Paris via la création d’une feuille de route pour le climat d’ici la fin d’année 2020. Elle clôture en ce moment une consultation publique sur le sujet, au cours de laquelle la société civile s’est impliquée. Après des progrès substantiels suite à la décision de mettre fin à la plupart de ses soutiens financiers aux énergies fossiles d’ici fin 2021, les efforts de la BEI ont été salués 2. Néanmoins, la banque publique est encore loin de tenir ses engagements en matière de climat. Cette transformation est d’autant plus importante compte tenu de son rôle phare dans le plan de relance économique de l’Union Européenne, en réponse à la crise sanitaire liée au Covid-19.
Le rapport “The EU Climate Bank – Greenwashing or a banking revolution ?” dévoile les nombreux projets néfastes pour le climat, l’environnement et la justice sociale soutenus par la BEI. Entre 2016 et 2019, la BEI a par exemple accordé plus de 4 milliards d’euros de prêts pour l’extension d’aéroports, 10,65 milliards d’euros pour des routes et autoroutes, et 2,83 milliards d’euros pour le secteur maritime. Si rien n’est fait, un prêt pour le projet d’extension de l’aéroport de Nice pourrait prochainement être accordé 3. Le rapport expose également certaines des lacunes de la nouvelle politique de prêt dans le domaine de l’énergie, qui permet à la banque de continuer à soutenir des infrastructures liées au nucléaire et aux énergies fossiles.
THE EU CLIMATE BANK – Greenwashing or a banking revolution ?
« La BEI continue de soutenir des projets polluants, notamment dans les secteurs de l’énergie et des transports. Les financements actuels aux extensions d’aéroports et à la construction de nouvelles autoroutes sont en totale contradiction avec les objectifs du Green Deal européen et les engagements de la BEI à se transformer en banque du climat. »
Les ONG pointent par ailleurs le risque de greenwashing des activités de la banque publique : fausses promesses autour du gaz vert, illusion de l’aviation verte et risques associés aux ‘solutions fondées sur la nature’. Elles critiquent aussi les prêts accordés à des entreprises polluantes sans condition de transformation de leur modèle économique, alors même que certaines d’entre elles développent de nouvelles centrales à charbon.
“Le rôle que la BEI est sur le point de jouer dans la reprise économique après la crise du Covid-19 devrait contribuer à la nécessaire métamorphose de nos sociétés face à la crise écologique. Or, sa transformation en Banque européenne du climat relève aujourd’hui plutôt de l’illusion verte que de la réalité. »
“En tant que membre important du Conseil des gouverneurs, Bruno Le Maire doit donc passer des paroles aux actes et peser pour changer les pratiques de la plus grande banque multilatérale au monde.” conclut Cécile Marchand.