Les graines d’un nouveau traité sur multinationales et droits humains sont plantées
Les Amis de la Terre International (ATI) saluent le soutien, l'intérêt et la mobilisation croissants qui se sont manifestés à Genève cette semaine, du 24 au 28 octobre 2016, à l'occasion des négociations visant à établir un traité inédit et nouveau sur les transnationales et les droits humains.
La création d’une série de règles internationales contraignantes aura de profondes implications pour les plus grandes entreprises dans le monde, les obligeant à respecter les droits humains, d’une façon dont elles n’avaient jamais eu à le faire jusqu’ici 1 2.
« L’objectif de ce traité a toujours été la création de règles contraignantes pour enfin contrôler les activités des entreprises multinationales et de leur chaîne de valeur. Le fait que de si nombreux pays – menés par l’Afrique du Sud et l’Equateur – aient fait entendre leur soutien sans équivoque à la création d’un cadre légal contraignant, donne exactement le bon ton pour des négociations ambitieuses et d’une grande portée », commente Lucia Ortiz, des Amis de la Terre Brésil, et co-coordinatrice du programme Justice économique et Résistance au néolibéralisme des Amis de la Terre International.
Les ATI sont aussi satisfaits de voir qu’un nombre croissant de pays – y compris l’UE et ses Etats membres – a participé de façon positive et constructive dans un échange d’opinions avec des organisations de la société civile, des avocats et d’autres experts. Les membres des ATI avaient demandé à leurs gouvernements nationaux de s’engager dans ce processus important, en vue de fournir une opportunité historique pour la justice et pour mettre fin à l’impunité des entreprises.
Selon Anne van Schaik, des Amis de la Terre Europe : « Nous sommes contents de voir que l’UE et certains Etats membres sont enfin dans la salle, en réponse à l’appel de 90 000 citoyens européens leur demandant de s’atteler à la tâche de créer un traité qui donne la priorité aux droits humains et non aux intérêts des entreprises.
Cependant, nous espérions qu’ils participent plus activement aux débats, et qu’ils soient mieux préparés, mais au moins ils sont venus. Maintenant ils doivent se concentrer sur la collaboration avec la société civile et les communautés affectées du monde entier, pour commencer à construire les éléments concrets nécessaires pour un traité solide et efficace ».
Le traité fournirait aussi un contrepoint indispensable à la promotion continue de traités de libre-échange et d’investissement de plus en plus controversés, qui promeuvent les droits des entreprises transnationales au détriment des peuples et de l’environnement, et leur permettent même de poursuivre en justice des pays directement devant des tribunaux secrets 3.
Cette semaine, les discussions à Genève ont aussi été marquées par la mobilisation forte et croissante de la société civile 4, avec des contributions formelles de communautés affectées venant du monde entier : les cas de violations des droits humains par des entreprises telles que Shell, Vale et Jindal Africa ont ainsi été présentés aux gouvernements. Les membres du réseau international des ATI ont formellement contribué au travers de dix présentations et interventions détaillées 5.
« Plus d’une centaine de militants venus de 29 pays étaient présents lors de cette session à Genève – le mouvement pour un traité contraignant qui priorise les droits humains sur les profits grandit rapidement. La force de la société civile s’est fait sentir à l’extérieur dans des activités publiques, et à l’intérieur, où des interventions et propositions fortes sur le contenu ont été faites. Nous avons également exprimé notre solidarité avec le peuple brésilien en défiant l’actuel gouvernement illégitime du Brésil », a ajouté Lucia Ortiz.
Les Amis de la Terre International attendent avec impatience la prochaine étape de ce processus crucial : l’Equateur, qui le préside, commencera un processus de négociations formelles. Nous espérons qu’il y aura un engagement encore plus large de tous les gouvernements de l’ONU – en particulier des pays d’Afrique, d’Asie, d’Amérique Latine et des Caraïbes – qui pourront bénéficier d’un mécanisme qui accroîtra leurs capacités de contrôler les activités des multinationales. Ceci est particulièrement nécessaire là où les menaces et la criminalisation des leaders communautaires défendant leurs droits et leurs territoires face à l’accaparement par les entreprises a conduit à des niveaux inédits de violence.
Il est aussi important de continuer à résister aux tentatives des entreprises de mainmise sur le processus et d’affaiblissement des ambitions, y compris en restreignant leur participation aux négociations en raison des conflits d’intérêts.
Les graines ont été plantées cette semaine. Nous devons maintenant, pour faire croître et soutenir ce traité, lui donner la force – au travers de règles et de mécanismes de mise en oeuvre effectifs – pour contraindre et contrôler les grandes entreprises, et pour prévenir et punir les violations des droits humains qu’elles commettent.
Contacts
Lucía Ortiz, Co-coordinatrice du programme Justice économique et Résistance au néolibéralisme des Amis de la Terre International
+55 48 99150071, lucia@foei.org
Langues: portugais, anglais et espagnol
Anne van Schaik, coordinatrice du programme Justice économique, Les Amis de la Terre Europe
+31 6 24343968, anne.vanschaik@foeeurope.org
Langues: hollandais, anglais et espagnol
Khalisah Khalid, coordinatrice des campagnes et du réseau, Les Amis de la Terre Indonésie – Walhi
+62813 11187 498, sangperempuan@gmail.com
Langues: Bahasa Indonesia et anglais
Alberto Villarreal, chargé de campagne sur le commerce et l’investissement, Les Amis de la Terre Amérique Latine et Caraïbes
+598 98556360, comerc@redes.org.uy
Langues: anglais et espagnol
Ronnie Hall, contact média
ronnihall@gmail.com, +44 7967 017281
Plus d’information ici www.foei.org/what-we-do/UN-treaty-on-TNCs et là http://radiomundoreal.fm/semana-de-movilizaciones-en?lang=es
Il y a actuellement un vide dans l’architecture légale internationale, qui fait que les entreprises transnationales ne peuvent être directement poursuivies pour des violations aux droits humains. C’est l’objet des discussions du Groupe de travail intergouvernemental (GTIG) à composition non limitée sur les sociétés transnationales et autres entreprises relatif aux droits de l’Homme, qui s’est réuni pour la seconde fois à Genève cette semaine.
Voir notamment la contribution formelle des ATI à la seconde session du GTIG, avec des propositions sur le champ d’application et le contenu potentiel du traité, y compris avec un focus sur les multinationales et leur chaîne de valeur, l’accès à la justice et aux réparations pour les victimes, et l’appel à la création d’une Cour internationale sur les multinationales et les droits humains.
Par exemple, en Europe, y compris à cause d’une inquiétude répandue des citoyens au sujet de ces tribunaux secrets qui bénéficient aux entreprises, les négociations sur le Traité transatlantique (TAFTA) sont à l’arrêt (pour plus d’information, voir : http://www.euractiv.com/section/trade-society/news/germany-says-ttip-dead-in-the-water/); des négociations similaires entre l’UE et le Canada (CETA) ont aussi vacillé au moment de la ratification.
Les ATI sont un membre actif de la Campagne mondiale pour démanteler le pouvoir des multinationales (http://www.stopcorporateimpunity.org/concrete-proposals-6-points-included-un-binding-treaty-human-rights-transnational-corporations-tncs/) et de l’Alliance pour un Traité (http://www.treatymovement.com), deux coalitions mobilisées pour la création d’un traité légalement contraignant sur les multinationales et les droits humains.
Voici la liste des membres de la délégation des ATI qui ont fait des présentations formelles lors de la seconde session du GTIG, et peuvent être contactés pour plus d’information :
- Lucia Ortiz, Les Amis de la Terre International : Déclaration d’ouverture sur les attentes des Amis de la Terre International pour la semaine
- Ricardo Navarro, Les Amis de la Terre El Salvador/CESTA : Violations systématiques des droits humains et crimes environnementaux commis par les multinationales – Exemples d’Amérique Latine
- Juliette Renaud, Les Amis de la Terre France : Exemples de législations nationales – le cas de la loi française sur le devoir de vigilance des multinationales
- Apollin Koagne Zouapet, Les Amis de la Terre Cameroun/CED : Le besoin pour le futur traité d’inclure les obligations extraterritoriales des Etats concernant la protection des victimes, des militants écologistes, des défenseurs des droits humains et des lanceurs d’alerte.
- Khalisah Khalid, Les Amis de la Terre Indonésie/WALHI : Le besoin pour le futur traité de couvrir l’intégralité de la chaîne de valeur des multinationales et leurs financeurs – le cas de Wilmar et Bumitama en Indonésie
- Syeda Rizwana Hassan, Les Amis de la Terre Bangladesh/BELA : Présentation lors d’un panel – Etude de cas – l’impunité de l’industrie de démantèlement des navires au Bangladesh
- Godwin Ojo, Les Amis de la Terre Nigeria/ERA : Difficultés lors des actions en justice contre les multinationales – le cas de Shell au Nigeria
- Anne van Schaik, Les Amis de la Terre Europe : Présentation lors d’un panel – Champ d’application du futur traité
- Arturo Pablo Juan, Les Amis de la Terre Guatemala/CEIBA : Lacunes existantes en matière d’accès à la justice et réparations – le cas d’Hidralia au Guatemala
- Gizela Zunguze, Les Amis de la Terre Mozambique/JA! : Le manque d’accès à la justice – les exemples de Vale et Jindal au Mozambique