Les ONG de protection de l’environnement reçues à Matignon
Paris, le 24 juillet 2012 – En prévision de la tenue les 14 et 15 septembre prochains de la “Conférence environnementale pour une transition écologique” organisée sous l'égide du Ministère de l’Environnement, du Développement durable et de l’Energie, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a souhaité en préalable s’entretenir avec les organisations non gouvernementales ayant participé au Grenelle de l’environnement [1].
Après les habituelles formules de politesse et un rappel formel sur l’engagement du Président de la République de « placer le dialogue environnemental au même niveau que le dialogue social », plusieurs points ont été soulignés par Jean-Marc Ayrault et notamment la volonté affichée du gouvernement de faire de la question du développement durable un objectif partagé par tous, et donc impliquant tous les ministères à travers la mise en place de politiques transversales. Les Amis de la Terre ne peuvent qu’approuver cette démarche qui consistera concrètement à ce que chaque ministère se voit remis d’ici la fin de l’année une lettre de cadrage incluant, en plus des contraintes budgétaires, les enjeux de développement durable liés à ses attributions.
Autre point jugé positif par les Amis de la Terre, le rappel fait par le Premier ministre du lancement dès la rentrée 2012 de la réforme du code minier [2], qui dans sa version actuelle n’est pas conforme à la charte de l’environnement car il ne prend pas en compte la nécessité de consultation et la participation du public aux débats sur les choix de projets d’exploration et d’exploitation du sous-sol. L’objectif pour le gouvernement est « de présenter un projet de loi au Conseil d’Etat d’ici la fin de l’année ». Les Amis de la Terre souhaitent être associés à la réflexion préalable à l’écriture du projet de loi, la ministre s’étant engagée à lancer une concertation sur ce thème. Les Amis de la Terre continueront à défendre une interdiction de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels sur le territoire français, quelle que soit la technique utilisée.
Par ailleurs, les Amis de la Terre réaffirment la nécessité d’une abrogation de l’ensemble des permis exclusifs de recherche d’hydrocarbures liquides ou gazeux existants (plus de 60 permis), ainsi que l’abandon des permis en cours d’instruction (plus de 90 permis). Car les Amis de la Terre rappellent que le problème de l’exploration et de l’exploitation des gaz et huiles de schiste ne se limite pas à la question de la fracturation hydraulique. Selon le Potsdam Institute for Climate Impact Research, contenir le réchauffement global moyen en deçà de 2°C d’ici à la fin du siècle équivaut à n’utiliser que le quart des réserves prouvées en combustibles fossiles (pétrole, gaz et charbon) d’ici à 2050. Dans ces conditions, pourquoi explorer le sous-sol ? Surtout lorsque l’on sait que les subventions aux énergies fossiles représentent actuellement plus de 750 milliards de dollars de fonds publics (590 milliards d’euros) dépensés chaque année pour soutenir la production et la consommation d’énergies fossiles alors que ces moyens financiers pourraient être mieux investis dans le développement des énergies renouvelables et l’adaptation aux changements climatiques. [3]
Actuellement, de nombreux pays Européens s’interrogent sur le fait d’exploiter ou non les gaz et huiles de schiste en raison de leurs forts impacts négatifs environnementaux et sociaux, et de l’opposition des populations locales (Bulgarie, République Tchèque, Grande-Bretagne), les Amis de la Terre approuveraient que le gouvernement français porte ce débat au sein du Parlement européen ; la Commission européenne devant se prononcer sur cette question à la rentrée de septembre.
Enfin, les Amis de la Terre s’étonnent de l’annonce faite par Jean-Marc Ayrault de soutenir le projet de loi de tarification progressive de l’énergie (gaz et électricité) dès la rentrée 2012, avant même que le débat annoncé sur la transition énergétique n’ait commencé, laissant ainsi de côté le
problème de la tarification de l’eau, engagement corolaire du candidat F. Hollande, et ceci alors que l’on sait que la disponibilité et les usages de l’eau seront un des graves problèmes des décennies à venir.
Si les Amis de la Terre saluent globalement l’exercice, ils maintiendront tout particulièrement leur vigilance sur ces dossiers sensibles.
Contact presse : Caroline Prak – 06 86 41 53 43 – 01 48 51 18 96
Notes
[1] Les Amis de la Terre, Humanité et Biodiversité, France Nature Environnement, la Ligue de protection des oiseaux, Greenpeace, WWF France, Ecologie Sans Frontière, la Fondation Nicolas Hulot pour l’homme et la nature.
[2] Le code minier est un texte de 1956, issu d’une loi de 1810, qui régit l’exploitation du sous-sol notamment pour la recherche de pétrole et de gaz.
[3] Source : « Fossil fuel subsidies and government support in 24 OECD countries », par Yves Cochet, Député européen et Elise Buckle, directrice de SustainEnergy