Loi Hulot : les améliorations doivent être confirmées et les dernières failles comblées
Hier, le projet de loi “Hulot” était examiné par la commission Développement durable de l’Assemblée nationale.
Un grand nombre de députés avaient repris nos propositions d’amendements visant à renforcer le texte, et plusieurs d’entre elles ont été adoptées : définition du gaz de mine, interdiction des techniques non conventionnelles, publication d’un cadastre minier numérique. Notre travail de plaidoyer et de campagne publique a donc en partie porté ses fruits (1). Cependant, les amendements visant à restreindre le droit de suite, cœur du problème du code minier actuel, ont tous été refusés : les explorations et exploitations d’hydrocarbures actuelles continueront donc jusqu’en 2040, sans réelle transition progressive. Nos organisations poursuivent leurs actions en vue du passage en plénière mardi 3 octobre.
Après un passage en commission Affaires économiques lundi, lors duquel le gouvernement avait refusé la quasi totalité des propositions d’amendements, le débat a été plus constructif hier en commission Développement durable. Notre travail de plaidoyer et de campagne publique a en partie porté ses fruits : des députés de différents groupes, y compris le rapporteur Jean-Charles Colas-Roy et le groupe LREM, avaient repris nos propositions d’amendements et plusieurs ont pu être adoptées.
Ainsi, si les amendements réintroduisant une définition et interdiction des hydrocarbures non conventionnels ont été refusés, notre proposition alternative de consolider la loi Jacob de 2011 en interdisant toutes les techniques reconnues comme non conventionnelles a été adoptée. Cela ferme donc davantage la porte à l’exploration et l’exploitation des gaz et huiles de schiste, mais aussi des gaz de couche.
Isabelle Levy, du collectif du Pays Fertois “Non au pétrole de schiste” commente : “La Française de l’énergie, qui a commencé des forages d’exploration de gaz de couche en Lorraine, ne va donc plus pouvoir continuer avec ses techniques de “stimulation”, qui lui avait permis jusqu’ici d’échapper à la loi de 2011. Elle ne va plus pouvoir jouer non plus sur la confusion avec le “grisou”, puisque les députés ont enfin pris acte de la différence entre le gaz de mine et le gaz de couche”.
En revanche, même si elle a été entendue, notre demande d’associer un cahier des charges à la délivrance de tout titre minier d’hydrocarbures, permettant d’interdire si besoin certaines techniques et de limiter les formations géologiques auxquelles s’appliquent le titre, n’a pas encore été concrétisée par un vote favorable : l’amendement du rapporteur a été retiré, mais il devrait être retravaillé pour la plénière.
Surtout, alors que différents amendements avaient été proposés pour interdire la prolongation des 33 permis de recherche actuels, et restreindre le “droit de suite”, ils ont tous été rejetés. Inscrit dans le code minier, le “droit de suite” donne un droit quasi-automatique au passage à la concession pour les entreprises qui détiennent un permis de recherche.
Selon Juliette Renaud, des Amis de la Terre France : “Le gouvernement refuse de s’attaquer au coeur du problème ! Nicolas Hulot s’est justifié en indiquant que selon lui, refuser une concession au motif de la lutte contre le changement climatique porterait atteinte aux “droits acquis” des industriels. Alors que ce projet de loi était censé “sonner la fin d’un modèle” selon les propres mots du ministre, le gouvernement s’obstine dans une logique du passé qui fait passer les intérêts économiques privés avant le climat, l’environnement et les populations”.
Par ailleurs, en limitant également à 2040 l’échéance des premières concessions qui seront données en vertu de ce droit de suite, les députés ont redonné un minimum de cohérence au texte. Il est néanmoins fortement regrettable que les amendements visant à restreindre les importations d’hydrocarbures, qui correspondent à 99% de la consommation française, et à ne pas soutenir l’industrie pétrolière française à l’étranger, n’aient pas été adoptés : le ministre et le rapporteur doivent s’engager à compléter le projet de loi à ce sujet pour lui conférer une exemplarité à laquelle il ne pourrait pas prétendre dans le cas contraire.
Enfin, dernière de nos revendications reprises : la transparence devrait être rétablie avec la publication des demandes de permis et de concessions, et des permis et concessions en cours, ainsi que leurs principales caractéristiques. En effet, plus aucune information publique n’était disponible en la matière depuis le 31 décembre 2015.
Pour Nicolas Haeringer, de 350.org, “ces avancées sont le fruit de la mobilisation des collectifs de lutte contre les pétrole et gaz de schiste et de couche, et d’une campagne d’interpellation des députés membres des commissions Affaires économiques et développement durable, que nous avons lancée il y a moins d’une semaine. Plus de 5000 personnes leur ont écrit pour leur demander de renforcer le texte de loi, ce qui est remarquable sur un sujet aussi technique”.
Maxime Combes, d’Attac France, conclut : « C’est en séance plénière que nous saurons si Nicolas Hulot et le gouvernement sont réellement disposés à combler les failles de la loi qui restent en suspens (droit de suite, fin du soutien aux activités des entreprises françaises à l’étranger et restrictions des importations notamment). Nous continuerons notre patient travail de conviction auprès des parlementaires et appelons à poursuivre la mobilisation pour que le contenu du projet de loi soit réellement à la hauteur de l’ambition affichée : mettre fin aux énergies fossiles”.
Contacts :
- Juliette Renaud, Les Amis de la Terre France : 06 37 65 56 40 / 09 72 43 92 61 – juliette.renaud@amisdelaterre.org
- Isabelle Lévy, collectif du Pays Fertois “Non au pétrole de schiste” (77) : 06 63 04 05 19 – isabelle.levy@orange.fr
- Nicolas Haeringer, 350.org : 06 50 86 12 59 – nicolas@350.org
- Maxime Combes, Attac France : 06 24 51 29 44 – maxime.combes@gmail.com
Notes :
(1) 350.org, Les Amis de la Terre France, Attac France et des collectifs contre les pétrole et gaz de schiste et de couche avaient lancé jeudi dernier une campagne d’interpellation des députés en ligne. Nos organisations avaient également publié une note de décryptage pointant les principales failles du projet de loi, et avaient pu faire part de leurs propositions concrètes d’amendements lors de leur audition par les commissions Développement durable et Affaires économiques de l’Assemblée nationale.