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Surproduction
Communiqué de presse10 juillet 2019

Lutte contre le changement climatique : un projet d’économie circulaire qui ne tourne pas rond

Montreuil, le 10 juillet 2019 - Le projet de loi de lutte contre le gaspillage pour une économie circulaire contient de réelles nouveautés sur les enjeux de consommation: invendus, consignes, indice de réparabilité, encadrement de la vente en ligne… Mais, syndrome de l’ «en même temps » et d’une stratégie de communication bien rôdée, le projet de loi n’est pas à la hauteur de l’urgence climatique et les plus grandes avancées environnementales et sociales - bonus-malus écologiques, don des invendus ou baisse des prix de la réparation - sont formulées au conditionnel, leur mise en œuvre étant reportée à des négociations ultérieures.

Le Haut Conseil pour le Climat a été clair: nous avons 10 ans pour transformer en profondeur notre modèle économique si l’on veut éviter le pire [[Haut Conseil Pour le Climat, Rapport annuel Neutralité Carbone – Agir en cohérence avec ses ambitions, juin 2019.]] – sécheresses, inondations, vagues de chaleur mortelles conduisant des centaines de millions de personnes à chercher refuge loin de leurs pays [[Organisation internationale des migrations, Migration et changement climatique , 2008]] . Les scientifiques ont déploré le manque d’ambition du Gouvernement et lui ont notamment demandé de prendre des mesures visant à réduire l’empreinte carbone liée aux importations [[Haut Conseil Pour le Climat, Rapport annuel Neutralité Carbone – Agir en cohérence avec ses ambitions, juin 2019.]].

Pourtant, le Projet de loi économie circulaire ne tient pas compte de l’avis du Haut Conseil. Il ne contient aucun objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre liées aux importations de produits textiles ou électroniques, représentant pourtant un quart des émissions des français [[Ademe, Modélisation et évaluation des impacts environnementaux de produits de consommation et biens d’équipements, 2018]] . Alors que les niveaux de production doivent rapidement baisser si l’on veut limiter le réchauffement global à 1,5°C [[B&L Evolution, Comment s’aligner sur une trajectoire compatible avec les 1,5°C ?, 2018]], rien n’est fait pour limiter l’expansion illimitée des zones commerciales et d’acteurs de la vente en ligne comme Amazon, qui augmentent la surproduction via le dumping et livrent les marchandises par avion. Le moratoire sur ces projets est pourtant demandé à la fois par les défenseurs du climat et les gilets jaunes [[Libération, Trois sites d’Amazon France bloqués par des militants écologistes, 2 juillet 2019 ]].

L’utilisation ambitieuse des possibilités ouvertes par la loi reste très incertaine, les représentants des fabricants travaillant déjà à convaincre ministères et parlementaires des bienfaits de maintenir le statu quo. Les bonus-malus à 20% du prix des produits, présentés comme une mesure phare du projet, ne seront éventuellement mis en œuvre qu’à la suite de négociations entre l’Etat et les fabricants électronique, textile, plastique [[Représentés par les éco-organismes des filières à responsabilité élargie des producteurs]] Une fois l’attention médiatique passée, il est probable que les systèmes de bonus-malus mis en place via ces processus soient faibles et ne permettent pas de créer un véritable signal prix en faveur des produits vertueux. L’annonce d’une écotaxe sur les billets d’avion, très en deçà de ce qu’une vraie taxe sur le kérosène aurait rapporté à l’Etat et ne permettant pas de rendre le train plus compétitif, est une illustration parfaite de ce que deviennent ces instruments quand manque la réelle ambition de transformer les secteurs auxquels ils s’appliquent.
L’hypothétique financement de la réparation et du réemploi est laissé dans les mains des… fabricants de produits. Enfin, l’interdiction de détruire les invendus permet toujours d’envoyer ces derniers directement au recyclage : un non-sens écologique et social.

Les Amis de la Terre invitent le Gouvernement et les parlementaires à renforcer l’ambition du texte lors de son passage au Sénat et à l’Assemblée nationale à la rentrée. Ils annoncent des mobilisations pour obtenir la mise en conformité du secteur de la distribution textile et électronique avec l’accord de Paris et notamment un moratoire sur les nouveaux entrepôts de la vente en ligne et les zones commerciales en périphérie.

Contact presse :
Alma Dufour, chargée de campagne Extraction et surconsommation aux Amis de la Terre, 06 67 92 36 89