Madagascar : l’Europe cherche à sécuriser son accès aux terres rares
Montreuil, le 24 avril 2012 - Après avoir fait pression sur la Chine, qui a annoncé restreindre ces exportations de terres rares, l’Europe cherche à prendre le contrôle de nouvelles mines, notamment à Madagascar, pour y extraire ces minerais indispensables à la fabrication de produits high tech.
Les Amis de la Terre dénoncent une nouvelle fois la stratégie européenne [1] qui vise à sécuriser l’importation de matières premières bon marché malgré les impacts environnementaux et sociaux liés à leur exploitation. L’Europe devrait plutôt chercher à en réduire la consommation.
Il y a quelques semaines, les États-Unis, l’Europe et le Japon ont déposé une plainte à l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) contre la Chine pour protester contre son annonce de restreindre ses exportations de terres rares [2]. 95% des terres rares sont actuellement exploitées en Chine, un monopole qui s’explique par la faiblesse des législations environnementales et sociales dans ce pays, ce qui a pour conséquence de réduire les coûts de production. Alors que le dépôt de plainte a été confirmé, l’entreprise française Rhodia et le groupe minier allemand TRE ont annoncé aujourd’hui vouloir ouvrir une nouvelle mine à Madagascar.
Camille Lecomte, chargée de campagne pour des modes de production et de consommation responsables aux Amis de la Terre s’interroge :« L’exploitation des terres rares est aujourd’hui possible en Chine car ce pays ferme les yeux sur les lourds impacts environnementaux et sociaux qu’elle provoque : destruction de quantité colossales de roches pour extraire quelques grammes de minerais, rejets de déchets toxiques, pollution des nappes phréatiques, ouvriers sous payés… l’Europe veux-elle être complice de l’exportation de ce modèle à Madagascar ? »
Juliette Renaud, chargée de campagne sur les industries extractives, s’est rendue à Madagascar en octobre 2011 pour y enquêter sur les activités de Total [3]. Elle complète : « Sur place, l’impuissance des autorités publiques à encadrer les industries extractives et leur méconnaissance des enjeux est flagrante. Tout comme Total, Rodhia et TRE veulent profiter de la faiblesse de la gouvernance malgache pour obtenir des concessions défavorables en tous termes : cela annonce une nouvelle catastrophe sociale et environnementale, sans même une contre-partie économique pour les populations ».
La prise de conscience de la dépendance des Européens à l’égard de certaines ressources doit les conduire à limiter leur consommation et non à cautionner la destruction de l’environnement dans d’autres pays. Pour les Amis de la Terre, les gouvernements et entreprises européennes doivent cesser cet accaparement de l’espace écologique des populations du Sud. L’association appelle à réduire les consommations en allongeant la durée de vie des produits électriques et électroniques, qui contiennent des terres rares et autres matières dites « stratégiques ».
Notes :
[1] Commission européenne, Initiative matières premières – Répondre à nos besoins fondamentaux pour assurer la croissance et créer des emplois en Europe.
2] Voir ici : https://www.amisdelaterre.org/communique-presse/terres-rares-l-hypocrisie-des-pays-developpes-297/
3] Voir ici : https://www.amisdelaterre.org/altermondes-total-une-catastrophe-annoncee/