Moratoire sur les entrepôts de e-commerce : l’annonce de Barbara Pompili crée de l’espoir mais la bataille au Gouvernement est loin d’être gagnée.
L’annonce de Barbara Pompili d’envisager un moratoire de 6 mois sur les entrepôts de e-commerce le temps qu’une étude d’impact soit menée représente enfin une faible lueur d’espoir pour les associations environnementales et les collectifs en lutte sur tout le territoire.
Ils dénoncent cependant une différence de traitement avec les zones commerciales, injustifiée d’un point de vue juridique, économique et environnemental. Ils s’inquiètent d’un éventuel blocage au moratoire sur les entrepôts de e-commerce au plus haut niveau de l’Etat.
La question du moratoire sur les entrepôts de e-commerce a fait du chemin en à peine quelques mois au sein du Gouvernement. Alors qu’Agnès Pannier Runacher et Matignon avaient d’abord affirmé y être opposés, l’annonce de Barbara Pompili d’un éventuel moratoire de 6 mois sur les entrepôts de e-commerce vient donc ouvrir une brèche, nécessaire, car au moins deux très importants projets Amazon sont en passe d’être autorisés dans les prochaines semaines1.
Les collectifs en lutte et les associations environnementales attendent néanmoins confirmation de cette annonce et s’inquiètent de la différence de traitement par le Gouvernement de l’enjeu des zones commerciales et de celui de l’expansion des entrepôts de e-commerce. En effet, alors que le Président puis le Premier Ministre ont soutenu le moratoire sur les zones commerciale, ils semblent considérer que le moratoire de la Convention Citoyenne pour le Climat ne les concerne pas.
C’est jouer au plus fin et trahir la Convention Citoyenne pour le Climat car les citoyens ont confirmé hier matin sur France Inter 2 qu’ils avaient entendu appliquer le moratoire aux entrepôts du e-commerce, aux impacts tout aussi dramatiques sur l’artificialisation, le changement climatique et la désertification des centres villes.
Le Gouvernement a en outre lui-même adopté une ordonnance le 17 juin dernier qui traite de la même manière zones commerciales et entrepôts de e-commerce dans les schémas régionaux de cohérence territoriales.
En effet, l’ensemble des projets connus d’Amazon et d’Alibaba en France auraient pourtant pour conséquence d’artificialiser plus d’1,4 millions de m2, de faire exploser l’empreinte carbone de la France avec l’importation de plus d’1,3 milliard de produits supplémentaires par an, et d’aggraver considérablement la crise dans le commerce non alimentaire, ce qui pourrait entraîner la suppression de 26 000 emplois à court terme.
Plus que du laisser-faire, exclure les entrepôts de e-commerce du moratoire reviendrait à offrir un pont d’or aux acteurs du e-commerce pour accroître leur emprise sur le marché français. Ceci 6 mois à peine après que Bercy se soit rendu compte d’une fraude massive à la TVA sur les sites d’Amazon et CDiscount, qui pourrait avoir engendré un déficit fiscal de 1,5 milliard d’euros en 2019 pour l’Etat Français3.
Alma Dufour, chargée de campagne aux Amis de la Terre conclut : “Nous attendons confirmation par le Gouvernement du gel de 6 mois. Nous craignons néanmoins qu’un rapport soit le meilleur moyen d’enterrer le sujet. Le Gouvernement n’a pas besoin d’y voir plus clair, il a en sa possession des éléments écologiques et économiques absolument accablants pour l’e-commerce. Aux Etats-Unis, où 9300 magasins ont encore fermé l’année dernière, personne ne pose plus la question de savoir si des destructions d’emplois massives sont bien provoquées par le développement de la vente en ligne. La vraie raison de leur hésitation : la puissance d’Amazon et d’Alibaba, et les répercussions possibles dans les relations de la France avec les Etats-Unis et la Chine. Que l’on aille pas ensuite dire que le moratoire est la mesure la plus courageuse jamais prise par un Gouvernement pour l’écologie”.