Mozambique : Société Générale et Crédit Agricole soutiennent le projet gazier très controversé de Total
Société Générale et Crédit Agricole choisissent d’ignorer les risques associés aux méga-projets gaziers au Mozambique. Les deux banques aident Total à mener à bien le financement de son projet Mozambique LNG, quitte à semer le chaos dans une région en proie à un conflit qui s’envenime.
Alors qu’est encore attendue la signature finale du financement de projet d’exploitation et d’exportation de gaz Mozambique LNG qui devait avoir lieu le mois dernier, le soutien des banques françaises à Total pour son projet controversé se clarifie. Selon Bloomberg, Société Générale, conseiller financier de Total sur Mozambique LNG, réunit une vingtaine de financeurs pour prêter 16 milliards de dollars sur les 23 milliards nécessaires à la construction des infrastructures 1. Parmi eux, on retrouve Crédit Agricole qui, en confirmant son financement de Mozambique LNG, acte son soutien aux trois projets gaziers en cours de développement au large du Mozambique. Après avoir financé Coral South FNLG, BNP Paribas et Natixis ont quant à elles assuré ne pas suivre Total sur ce nouveau projet gazier 2. Interrogée par les Amis de la Terre et par des journalistes, Société Générale refuse pour sa part de clarifier sa présence ou non dans la liste des financeurs.
Lorette Philippot, chargée de campagne finance privée aux Amis de la Terre France, commente : “Alors que BNP Paribas et Natixis ont décidé de rester à l’écart de Mozambique LNG, Société Générale et Crédit Agricole répondent par le déni aux preuves du désastre en cours. Société Générale continue même de s’enliser dans le projet : en plus de conseiller et de potentiellement participer au financement du projet de Total, elle vient tout juste d’être mandatée par l’Etat mozambicain pour assurer le financement des parts que celui-ci détient dans Mozambique LNG 3.”
L’eldorado gazier tourne déjà au cauchemar pour la population mozambicaine et plus particulièrement pour les habitants de la région de Cabo Delgado, en proie à un conflit qui s’embrase 4. Fin juin, celle-ci a une nouvelle fois été le terrain d’affrontements meurtriers, à proximité des sites gaziers 5. La semaine dernière, 8 employés d’un sous-traitant de Total y ont été tués 6. En plus d’attiser les tensions dans la province et de priver plus de 500 familles de leurs moyens de subsistance, l’exploitation des immenses réserves gazières au large du Mozambique aura des conséquences irréversibles sur le climat et la biodiversité.
“Le projet gazier de Total au Mozambique est risqué sur tous les plans. Pourtant, comme si le ‘monde d’après’ ressemblait étrangement au monde d’avant pour Total et ses banquiers, rien ne semble les arrêter dans leur course au profit : ni l’aggravation d’un conflit violent, ni les violations des droits humains, ni la crise climatique.” poursuit Cécile Marchand, chargée de campagne climat et acteurs publics aux Amis de la Terre France.
Les Amis de la Terre somment Société Générale et Crédit Agricole de se raviser avant la clôture définitive du financement prévue fin août et de ne pas accorder de services financiers ni au projet Mozambique LNG, ni à tout autre développement gazier dans le pays. L’ONG demande au gouvernement français de mettre fin à tout effort diplomatique pour sécuriser les intérêts des entreprises françaises dans les projets gaziers, en gelant notamment toute aide à l’exportation. Quant à Total, elle lui demande de se retirer, au lieu d’envisager déjà l’agrandissement de son projet avec deux trains de liquéfaction supplémentaires.
Les Amis de la Terre, juin 2020, De l’eldorado gazier au chaos. Quand la France pousse le Mozambique dans le piège du gaz.