Non à la méga-mine d’or industrielle en Guyane !
En toute discrétion, l’Etat français encourage des multinationales étrangères à lancer de gigantesques exploitations minières en plein coeur de la forêt guyanaise. Parmi eux, le projet Montagne d’Or porté par le consortium russo-canadien Nordgold/Columbus Gold devrait démarrer dès 2018.
Il s’agirait de la plus grande mine d’or 1 2 jamais exploitée sur le territoire français. Les mines industrielles d’or sont encore aujourd’hui à l’origine d’impacts humains et environnementaux graves, souvent irréversibles 3 . On ne peut accepter de détruire une partie de l’exceptionnelle biodiversité guyanaise et prendre le risque d’accidents majeurs pour l’extraction d’une substance dont l’utilité sociale et industrielle est secondaire aujourd’hui. Nos 20 organisations 4 demandent donc au gouvernement français un moratoire sur l’exploitation minière à grande échelle en Guyane et l’arrêt immédiat de tous les projets de ce type déjà engagés.
Des projets miniers titanesques
Parce que les quantités d’or présentes dans la roche sont infimes (1 à 2 grammes d’or par tonne de roche), le projet Montagne d’Or nécessitera le creusement d’une fosse de 2,5 km de long, 500 m de large (soit une surface équivalente à 150 stades de football) et 400 m de profondeur 5 . Ceci générera un volume de déchets miniers, extrêmement nocifs, estimé à 400 millions de m3. Par ailleurs, les besoins énergétiques de l’usine de traitement du minerai équivaudraient à 20 % de la consommation annuelle de la Guyane 6 . De plus, le Conseil Consultatif des Populations Amérindiennes et Bushinengué (CCPAB) alerte sur les demandes de rétrocession de 200 000 hectares de forêts primaires, incluant les terres coutumières et les aires de subsistance de ces communautés, afin de fournir en bois la centrale électrique qui alimenterait l’usine de traitement du minerai 7. Le CCPAB dénonce également le fait que leur avis n’a pas été sollicité dans le cadre du projet Montagne d’Or, au mépris de la législation française 8.
Nos associations alertent sur le fait que si la France autorise l’exploitation à grande échelle d’un premier gisement, elle s’exposera nécessairement à la multiplication de projets miniers équivalents. D’ailleurs, la suite est déjà lancée : avec 36 concessions ou permis d’exploitation en cours de validité et 21 permis d’exploration demandés ou en cours 9, ce sont 320 000 hectares du territoire guyanais qui intéressent les entreprises minières du monde entier.
Des risques connus et inacceptables
Les sites industriels de ce type détruisent immanquablement la forêt et les écosystèmes sur lesquels ils s’implantent en perturbant l’environnement par le transport d’eaux polluées et de boues issues des zones travaillées et des stockages de déchets miniers. De plus, le site minier de la Montagne d’Or s’inscrirait sur une surface de 12 km², entre deux réserves biologiques intégrales, à moins de 500 m de l’une d’entre elles.
Le risque industriel le plus fort repose sur le stockage en digue de millions de tonnes de boues cyanurées. Ces barrages sont particulièrement sensibles à l’accumulation d’eau qui augmente le risque de rupture. Contrairement aux affirmations des entreprises minières, le risque est loin d’être isolé : au moins 25 ruptures de digue ont eu lieu depuis 2000 dans le monde 10. L’exemple le plus récent est celui de Samarco au Brésil en novembre 2015, le « Fukushima brésilien ».
Extraire de l’or est devenu une aberration industrielle
La majeure partie de l’or exploité durant toute l’histoire est stockée actuellement sous forme de lingots ou de bijoux quand seulement 8 % de l’or extrait chaque année sert à l’industrie et 35 % sont destinés au secteur bancaire 11 . En 2016, on estime qu’environ 20% de tout l’or que l’Homme a extrait se trouve dans les banques centrales 11. En 2015, la filière du recyclage a fourni 3 fois plus d’or que les besoins industriels , alors même qu’elle est sous-développée en France.
Contrairement aux idées reçues, l’exploitation minière de l’or n’est donc pas indispensable au secteur industriel et la demande des secteurs joaillier et financier ne justifient pas la mise en péril de l’environnement et de la santé humaine à un tel degré.
Pour Thibaud SAINT-AUBIN, président de l’association ISF SystExt : « Toutes ces raisons justifient l’arrêt du projet minier aurifère industriel de la Montagne d’Or. Les garanties techniques ne suffisent pas à en faire une solution de développement pérenne pour la Guyane et ses habitants. De plus, il ouvre la porte à des projets titanesques dans toute l’Amazonie. D’autres voies de développement économiques sont possibles pour la région si nous ne détruisons pas ses ressources écologiques inestimables. »
Signataires :
Contacts Presse
Or de Question
Harry HODEBOURG : 06 94 90 90 73 (en Guyane) – ordequestion@gmail.com
Patrick MONIER : 05 55 89 13 88 (en Métropole) – patrick.monier960@orange.fr
Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme
Denis VOISIN : 06 98 46 00 42 (en Métropole) – d.voisin@fnh.org
ISF SystExt
Thibaud SAINT-AUBIN : 06 03 19 54 56 (en Métropole) – thibaud.saint-aubin@isf-france.org
Photo : Vue aérienne de la forêt guyanaise [© Maiouri Nature PhB]
Documents joints
Collectif Or de Question ! (Maïouri Nature Guyane, Ligue des Droits de l’Homme – Section Guyane, Fédération des Organisations Amérindiennes de Guyane (FOAG), Collectif des Premières Nations, Collectif Couachi, Mama Bobi, Réseau Makandi Makandra, Compagnie des Guides de Guyane, Aquaa, Réseau Colibris Guyane, Guyane mo péyi/GMP, G-Crew Music, Bouteille à la mer, GADEPAM, ICRA International) et : ISF SystExt, France Libertés-Fondation Danielle Mitterrand, Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme, Les Amis de la Terre et Sauvons la forêt.
Projet aurifère de Montagne d’Or. Étude d’impact environnemental et social (en cours). Document d’information en préparation à la 2ème série de consultations des parties prenantes du projet, WSP, Colombus Gold et Nordgold, Mai 2016.
Avis délibéré de l’Autorité environnementale sur la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) de la Guyane (973) pour les périodes 2016-2018 et 2019-2023, Avis délibéré n°2016-75 adopté lors de la séance du 19 octobre 2016, Formation d’Autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable.
La centrale à biomasse est l’une des hypothèses envisagées par l’Etat. Les autres alternatives seraient une centrale thermique ou un second barrage hydro-électrique noyant des centaines de milliers d’hectares de forêts primaires.
Loi 2011-884 du, 27 juillet 2011, titre XII Chap. 1 : Art L71-121-4 et L 71-121-5
Chronology of major tailings dam failures ; base de données [consultable en ligne, dernière mise à jour le 22/09/2016.