Nouveau rapport : mines et forages en France, un renouveau extractif discret mais bien réel
Le mardi 6 décembre 2016 – Nouvelle proposition de loi sur le code minier déposée à l'Assemblée nationale (1), rejet d'une demande de prolongation de permis de gaz de schiste dans le Sud-Ouest (2) : la question extractive semble refaire surface en France.
En réalité, elle n’a jamais été enterrée et notre territoire est quadrillé de permis : tout est prêt pour une relance minière et pétrolière, lorsque le contexte économique et politique sera de nouveau favorable, dans un futur peut-être proche. C’est ce que révèle le nouveau rapport que publient aujourd’hui les Amis de la Terre France : “Creuser et forer, pour quoi faire ? Réalités et fausses vérités du renouveau extractif en France” (3). Il décrypte la situation réelle du secteur extractif français, et démonte un à un les faux arguments qui sont martelés pour promouvoir une relance et obtenir l’acceptabilité sociale de ces projets aux lourds impacts sociaux, environnementaux et climatiques.
La France, un pays minier et pétrolier ? On croyait le temps des mines révolus, et le risque de voir se multiplier les puits de gaz de schiste définitivement écarté. Pourtant, les pressions politiques et industrielles pour promouvoir un renouveau extractif sont toujours bien réelles, et suivies de faits concrets. Côté hydrocarbures par exemple, on compte encore 55 permis en cours de validité, et 132 demandes en attente, concernant principalement des gaz et huiles de schiste.
Juliette Renaud, chargée de campagne sur les Industries extractives aux Amis de la Terre, commente : « On en est à la énième proposition de réforme du code minier, mais les différents textes ne répondent en rien aux enjeux posés par le secteur, et ne cherchent pas réellement à l’encadrer (4). Pendant ce temps-là, les entreprises minières et pétrolières placent tranquillement leurs pions dans toute la France, et continuent le lobbying de couloir. Il est temps que l’avis de populations soit respecté, et leur message est clair : « mines, gaz et huiles de schiste et de couche, ni ici, ni ailleurs ! » ».
Les industriels et de nombreux responsables politiques, y compris au gouvernement, multiplient les promesses pour redorer l’image de ce secteur : en France les mines et les forages seront « propres » et « responsables », ils nous libéreront de notre dépendance vis-à-vis de la Chine et de la Russie, et ils créeront une manne d’emplois dans nos territoires. Pourtant, confrontés à la réalité des faits, à commencer par les lourds passifs miniers encore présents à Salsigne, ou dans le Limousin, ces arguments ne tiennent pas et se révèlent de simples mirages visant à amadouer les populations locales et faire taire les critiques.
De plus, des alternatives concrètes existent comme l’explique Camille Lecomte, chargée de campagne sur les modes de production et consommation responsables : « Pour réduire notre dépendance, au lieu de rouvrir des mines, il convient de réduire notre consommation notamment en allongeant la durée de vie de nos biens et en donnant plusieurs vies aux matières déjà prélevées grâce au recyclage. ».
Juliette Renaud conclut : « Si l’on veut rester en dessous des 1,5°C de réchauffement climatique, tout investissement dans les énergies fossiles doit cesser immédiatement (5). Cela veut dire, plus aucun permis octroyé ou prolongé, et cela inclut les investissements dans le secteur du gaz, qui est actuellement promu comme une « énergie propre », de « transition ». La France et l’Union européenne doivent arrêter de soutenir les infrastructures qui nous enferment dans notre dépendance à ces énergies du passé, comme le terminal méthanier de Dunkerque, qui pourrait très bientôt être la porte d’entrée aux importations de gaz de schiste américain ».
Les Amis de la Terre France continueront donc de se mobiliser, aux côtés des collectifs citoyens, pour faire obstacle à cette relance minière et pétrolière. Dans leur nouveau rapport, ils font des recommandations concrètes aux pouvoirs publics, afin de sortir de notre dépendance aux énergies fossiles et aux métaux. Il en va de la cohérence des politiques publiques de la France, et du respect de nos engagements internationaux, notamment en matière de lutte contre le changement climatique.
Contacts presse :
Juliette Renaud, chargée de campagne sur les Industries extractives, Les Amis de la Terre France : +33 9 72 43 92 61
Pierre Sagot, chargé de communication, Les Amis de la Terre France : + 33 6 86 41 53 43 / +33 9 72 43 92 65, communication@amisdelaterre.org
Notes :
(1) Le groupe socialiste à l’Assemblée nationale a en réalité déposé une première proposition de loi le 21 septembre 2016 (n°4043, portant adaptation du code minier au droit de l’environnement), puis l’a remplacée le 23 novembre 2016 par une deuxième beaucoup plus courte (n°4251), supprimant certaines dispositions problématiques. Le texte a été renvoyé à la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, qui effectue actuellement des auditions et devrait être examiné en plénière début 2017.
(2) Le tribunal administratif de Pau a contesté la décision de refus de prolongation du permis de Saint-Griède le 17 novembre dernier. Quelques jours plus tard, la ministre de l’Environnement et de l’énergie a annoncé avoir pris un nouvel arrêté pour rejeter la demande de prolongation de ce permis.
(3) Le rapport est disponible ci-dessous et à ce lien.
(4) Les dernières propositions de réforme du code minier proposent une « procédure renforcée d’information et de concertation du public » mais celle-ci reste facultative, aucune saisine citoyenne n’est prévue, et ses conclusions ne sont pas contraignantes. Tout comme la politique nationale des ressources et des usages miniers qui serait créée : même si elle incluait des considérations sociales, environnementales et climatiques, elle ne pourrait être invoquée par l’État pour refuser l’octroi d’un titre minier.
(5) Voir le dernier rapport d’Oil Change International, The sky’s limit (septembre 2016).
Rapport – Creuser ou forer, pour quoi faire ?