Plan d’action pour la filière bois : où sont les mesures pour la biodiversité ?
Nicolas Sarkozy a annoncé aujourd‘hui les mesures envisagées pour la « filière bois » en France, suite à la remise du rapport de l’ancien ministre de l’Agriculture Jean Puech.
Si ces mesures permettent d’envisager une mobilisation accrue de bois en France, les Amis de la Terre regrettent l’absence de mesures structurantes pour préserver la biodiversité et relocaliser l’économie forestière. Ces éléments-clés sont présentés dans leur nouveau rapport « Construire une société soutenable : quelle production pour quels usages du bois des forêts françaises ? » avec d’autres éléments de propositions faites à Monsieur Puech.
« Récolter plus de bois tout en préservant mieux la biodiversité ». C’est la principale conclusion du Grenelle de l’environnement à propos des forêts françaises. Or, avant d’envisager de récolter davantage de bois, la priorité est de restaurer la qualité des écosystèmes forestiers pour assurer leur fonctionnement sur le long terme. Pour ce faire, les Amis de la Terre ont proposé deux mesures structurantes à Monsieur Puech :
• Protéger, de façon efficace et représentative la diversité des écosystèmes, en créant des espaces sans exploitation forestière couvrant 10 % de la surface forestière française.
• Inscrire dans la loi forestière la nécessité de conserver en forêt au moins 25 % de la production biologique.
Aucune de ces deux mesures, pourtant simples, n’a été retenue.
Sylvain Angerand, chargé de campagne Forêts pour les Amis de la Terre, explique : « Nous en avons assez des promesses sur la biodiversité. Le Gouvernement a, par exemple, pris l’engagement de créer un parc national de forêt de plaine mais les sites proposés ne présentent qu’un faible intérêt en terme de biodiversité : c’est un marché de dupe. Sous prétexte de s’adapter au changement climatique, le rapport Puech propose d’intensifier la sylviculture, d’introduire des arbres exotiques et de raccourcir les rotations : pourtant de nombreux scientifiques préconisent l’exact inverse c’est-à-dire laisser vieillir les arbres pour stocker davantage de carbone, aller vers une sylviculture de bois de qualité et favoriser la diversité des arbres pour que la forêt s’adapte plus facilement aux changements climatiques. »
Par ailleurs, un plan de mobilisation du bois ne peut pas faire l’impasse sur le sujet tabou de la filière bois : la dépendance aux importations, qui représente le deuxième poste de déficit commercial de la France.
Pour Sylvain Angerand: « Il est possible de réduire drastiquement les importations de bois, notamment celles en provenance des forêts boréales ou tropicales, en valorisant mieux le bois des forêts françaises. Les propositions du rapport Puech vont dans le bon sens mais ne sont pas encore assez pertinentes. Nous proposons une véritable planification pour éviter la surexploitation des massifs les plus accessibles, des mesures qui ciblent de façon spécifique les petites entreprises de la filière bois et demandons un engagement politique fort pour soutenir les filières courtes. Les mesures annoncées aujourd’hui risquent plutôt de renforcer les grosses entreprises et les importateurs et d’exclure les plus petites entreprises qui jouent pourtant un rôle indispensable dans les territoires ruraux ».
Enfin, les Amis de la Terre demandent un vrai débat de société sur les usages du bois. Sylvain Angerand explique : « Le bois est une ressource renouvelable mais pas illimitée. Il est temps d’apprendre à partager et de faire des choix, par exemple, en réduisant la consommation de papier pour valoriser les déchets de scieries et les bois d’éclaircies en bois énergie plutôt qu’en papier. »
Au final, les Amis de la Terre regrettent le manque d’équilibre de ce nouveau « plan bois », concocté par le même cercle d’experts de la filière bois qui élaborent les politiques forestières depuis des années, et l’absence d’ouverture vers la société civile au sens large (collectivités locales, syndicats, associations).