Plus de la moitié des terres que l’Europe consomme se situent à l’extérieur du continent
Les besoins en terres de l’Europe sont parmi les plus importants au monde. Notre continent est le plus dépendant des terres situées à l’extérieur de ses frontières, comme le révèle notre nouveau rapport de recherche.
Les Amis de la Terre Europe et le Sustainable Europe Research Institute (SERI) ont modélisé les flux invisibles de terres dans le monde, afin de calculer les besoins en terres d’un grand nombre de pays et de régions.
Ces besoins représentent la somme des terres qu’un pays consacre aux productions destinées à sa consommation domestique et de celles qu’elles « empruntent » aux autres pays du fait de l’importation de produits comme les denrées alimentaires ou les vêtements, déduction étant faite de celles consacrées aux produits d’exportation [1].
Cette étude montre que les hauts niveaux de consommation en Europe, et notre forte consommation de viande, de produits laitiers et d’autres denrées dont la production requière de larges surfaces, gonflent de façon insoutenable notre besoin en terres. L’Europe mobilise ainsi 640 millions d’hectares par an pour sa consommation, soit 1,5 fois sa propre superficie. La consommation moyenne de terres de l’Union européenne est de 1,3 hectares par personne, alors que celle de pays comme la Chine ou l’Inde n’est que de 0,4 hectares par personne.
Sylvain Angerand, coordinateur des campagnes pour les Amis de la Terre France explique : « La surconsommation en Europe est l’un des plus puissants moteurs de l’accaparement de l’espace écologique des pays du Sud par les pays riches. Dans un monde où la quantité de terres est limitée, la surconsommation des uns signifie l’impossibilité pour d’autres de répondre à des besoins fondamentaux comme cultiver la terre pour se nourrir. »
L’Europe est le continent le plus dépendant des importations de terres : 60 % des terres que nous consommons sont situées à l’extérieur de nos frontières. L’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Italie, la France, les Pays-Bas et l’Espagne sont dans la liste des dix pays au monde qui dépendent le plus de l’importation de terres pour leurs économies.
Notre recherche utilise les données datant de 2004, soit les plus récentes disponibles mais tout porte à croire que la tendance s’accentue du fait de la demande croissante en agrocarburants comme l’explique Christian Berdot des Amis de la Terre : « Le développement des agrocarburants a conduit à un doublement de la consommation européenne d’huile végétale [2]. Plutôt que de repenser nos transports pour réduire la demande en énergie, nous sommes obligés de résister à des projets toujours plus nombreux d’ouvertures d’usine d’importation comme celle de Port la Nouvelle dans l’Aude . »
En septembre 2011, la Commission européenne a reconnu qu’il était nécessaire de prendre en compte les importations de terres de l’Europe mais sans préciser de mesures concrètes [3]. Une consultation s’ouvre dans les deux prochaines années pour mesurer notre consommation de ressources naturelles et fixer des objectifs. Pour les Amis de la Terre, l’enjeu pour l’Europe est de réduire sa surconsommation de terres et de ressources naturelles.
[1] Pour cette étude, l’empreinte en terre de l’Union européenne et de nombreux autres pays a été calculée en utilisant des données sur l’utilisation des sols de la Food and Agriculture Organisation (FAO), combinées avec une base de données du Global Trade Analysis Project (GTAP) sur les échanges commerciaux. L’empreinte en terre pourrait également être calculée pour des produits, des entreprises ou des individus mais avec une méthodologie différente.
[2] Entre 1999 et 2010, la consommation européenne d’huile végétale a presque doublé passant d’environ 12 à 22 millions de tonnes / an. Source : US Department of Agriculture : et European Biofuel Board, voir le rapport des Amis de la Terre « Arnaque à l’huile de palme durable » : https://www.amisdelaterre.org/communique-presse/arnaque-a-l-huile-de-palme-durable/
3] Voir l’analyse des Amis de la Terre.
Le contenu de cet article relève de la seule responsabilité de Global 2000 et des Amis de la Terre, et ne pourrait, en aucun cas, être considéré comme reflétant l’avis de l’Union européenne.