Révélations sur Decathlon : les organisations environnementales et de droits humains appellent à la régulation
Depuis mardi, l’ONG d’investigation Disclose publie une enquête en trois volets sur les pratiques du géant français du sport Decathlon.
Ces révélations s’accompagnent de la diffusion, ce soir, d’un numéro de l’émission Cash Investigation sur la famille Mulliez, actionnaire majoritaire de Decathlon. Exploitation des ouvrier·e·s, travail des enfants, recours au travail forcé de la minorité ouïghoure, déforestation… rien ne semble manquer à la liste des mauvaises pratiques de l’enseigne. Les organisations de la société civile rappellent l’urgence de mesures d’encadrement des multinationales du textile.
Enseigne préférée des Français·es en 2024, Decathlon s’est forgée une réputation grâce à des produits innovants et à bas prix, avec la promesse de rendre le sport accessible pour toutes et tous. Partout sur le territoire français puis mondial, où un magasin ouvre tous les 4 jours, la multinationale a implanté ses centres commerciaux, s’imposant de manière quasi-monopolistique comme équipementier des loisirs sportifs. Pourtant, pour afficher des prix aussi bas en rayon, Decathlon impose une pression sur les coûts à ses sous-traitants, ce qui engendre des conditions de travail indignes.
La production massive, standardisée, à renouvellement permanent et sans pénurie, de vêtements bon marché par une main d’œuvre exploitée est la définition même de ce modèle économique qui inonde le marché de vêtements jetables : la fast-fashion.
Les révélations de l’enquête de l’ONG Disclose confirment que Décathlon s’inscrit bien dans ce modèle qui exploite les ouvrier·e·s comme l’environnement. Ces pratiques permettent à l’enseigne de faire toujours plus de profits : son chiffre d’affaires a doublé en dix ans, atteignant 15,6 milliards d’euros en 2023. En l’absence de régulation, les multinationales s’enrichissent tandis que les ouvrier·e·s s’appauvrissent et que les écosystèmes s’effondrent sous la pression d’une production sans limite.
Mathilde Pousseo, déléguée générale d’Ethique sur l’étiquette déclare “Nous ne pouvons nous résoudre à être spectateur·ices et commentateur·ices de ces conditions de production indignes. Elles sont la conséquence directe de la pression sur les coûts et les délais que met l’enseigne sur une chaîne de sous-traitance si complexe qu’elle n’est pas maîtrisée. Il y a urgence à agir et mettre fin à ces pratiques d’un autre temps“
Salma Lamqaddam, chargée de campagne à ActionAid France : “Alors qu’en France, des employé·e·s dénoncent la priorité donnée aux actionnaires au détriment des conditions de travail et de production, au Bangladesh, les organisations s’organisent contre la complicité de la marque dans la répression des mouvements ouvriers. 5000 personnes produisant pour Décathlon sont aujourd’hui menacé·e·s de prison.”
“Il ne faut pas être naïf, quand autant de vêtements sont vendus à des coûts aussi dérisoires, il y a forcément exploitation des personnes et de l’environnement derrière. Comme beaucoup d’autres, Decathlon participe aux ravages de la fast-fashion et profite de l’impunité du secteur en matières de règles sociales et environnementales”
Catherine Dauriac, présidente de Fashion Revolution France : “N’oublions pas que tous ces produits à bas coût sont délétères non seulement pour celleux qui les fabriquent mais aussi pour les consommateur.ices en bout de chaîne. Un problème de santé publique à rappeler d’urgence.”
Aussi, nous demandons en urgence la programmation au Sénat de la loi française sur la fast-fashion, votée à l’unanimité en première lecture à l’Assemblée nationale le 14 mars 2024. Nos organisations s’opposent plus que jamais au détricotage du Green Deal européen annoncé par Ursula Von der Leyen et restent mobilisées pour le maintien de la directive sur le devoir de vigilance, en rappelant la nécessité de transparence sur l’ensemble de la chaîne de production des produits commercialisés dans l’Union Européenne.