« PLAN CLIMAT » SUR LES FINANCEMENTS EXPORTS
Finance
29 octobre 2020

Le gouvernement dans le déni de l’urgence climatique

Le 12 octobre dernier, le gouvernement a remis au Parlement un rapport sur la décarbonation des financements export de la France. Car oui, en France en 2020, la puissance publique apporte encore son soutien financier à l’exploitation des énergies fossiles à l’étranger.

Nous avons décrypté pour vous ce “Plan Climat” et pas de surprise : il ne répond ni à l’urgence absolue de freiner l’expansion des énergies fossiles dans le monde, ni à la nécessité d’enclencher la transition juste dès aujourd’hui dans le secteur des hydrocarbures en France ! 

Interpellez les député·es en amont du vote sur le projet de loi de finance

Retrouvez les députés à interpeller via l’outil ci-dessous, développé par le Réseau Action Climat. Leur vote peut faire la différence pour mettre un coup d’arrêt à de nouveaux projets climaticides !

Les financements export, CQFD ?

Les garanties à l’exportation sont des outils financiers permettant d’aider les entreprises actives sur le sol français à exporter. Pour faire court, l’État se porte, via la filiale Assurance Export de Bpifrance, garant de prêts octroyés par des banques commerciales aux entreprises pour des transactions à l’étranger. En cas de pépin, c’est le contribuable qui indemnise la banque, pas l’entreprise. Ce type de subvention publique permet de dérisquer des projets qui pourraient ne pas voir le jour sans le concours de la puissance publique, mais aussi aux entreprises d’emprunter moins cher auprès des banques. Depuis 2016, Bpifrance a repris pour le compte et sous le contrôle de l’État cette activité, opérée auparavant par la Coface. De nombreux pays de l’OCDE possèdent une telle agence de crédit à l’exportation et subventionnent, à travers elles, les énergies fossiles. Entre 2016 et 2018, les pays du G20 ont fourni à travers elles 31,6 milliards de dollars par an d’aides financières aux énergies fossiles. En France ce sont au moins 9,3 milliards depuis 2009 pour le pétrole et gaz.

Faux plan de sortie, vrai plan d’accompagnement de l’expansion du secteur

Ce Plan Climat, présenté par le gouvernement comme “ambitieux”, propose de soutenir financièrement de nouveaux projets pétroliers jusqu’en 2025 et gaziers jusqu’en 2035. Il correspond plus aux trajectoires de croissance de Total qu’aux scénarios climatiques du GIEC. C’est impossible si nous ne voulons pas courir le risque d’une augmentation de la température globale de +4°C à +5°C d’ici 2100. Pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C et maintenir des conditions de vie dignes sur Terre, il est indispensable de de cesser tout développement permettant l’exploitation de nouvelles réserves de pétrole et gaz.

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Portes ouvertes à de nouvelles installations

Le plan exclut la question des infrastructures de transport d’énergies fossiles (gazoducs, oléoducs, terminaux de gaz naturel liquéfié) alors qu’elles sont souvent directement liées à l’exploration de nouveaux gisements d’hydrocarbures et sont donc tout aussi problématiques que l’exploitation en elle-même.

Concernant la production d’électricité à partir d’énergies fossiles, les critères sont si flous et larges qu’ils laissent la porte grande ouverte à la construction de nouvelles centrales à gaz partout dans le monde.

Fausses justifications sur le développement

A la demande du Parlement, le gouvernement devait fournir des éléments sur l’impact des projets soutenus à l’export sur le développement des pays concernés. Or, ce que les Amis de la Terre observent depuis des dizaines d’années en travaillant avec des communautés impactées par les projets d’hydrocarbures partout dans le monde, c’est qu’ils sont loin de contribuer au “développement”, bien au contraire. Au Mozambique par exemple, les projets gaziers contribuent à accroître les inégalités, privent des communautés de leurs moyens de subsistance et contribuent à la déstabilisation d’une région toute entière. En soutenant financièrement ces projets, l’Etat français se rend complice des violations des droits humains.

Soutien à la politique énergétique de la Russie et projets en Arctique

Au cours de la décennie passée, près de 40 % des projets d’hydrocarbures soutenus étaient en Russie. Le gouvernement étudie par ailleurs la possibilité d’octroyer une nouvelle garantie de 700 millions d’euros pour un projet de Total dans l’Arctique russe, Arctic LNG 2. En 2017, la France avait déjà soutenu financièrement un projet voisin (Yamal LNG).

L’exploitation des hydrocarbures en Arctique enfonce cette région dans un cercle vicieux, alors qu’elle est déjà le théâtre de l’emballement climatique, comme en témoignent les niveaux record de fonte des glaces, les feux de forêts qui ont ravagé la Sibérie cet été et les gouffres géants qui sont apparus suite à la libération de méthane normalement enfermé dans le pergélisol.

L’enjeu de l’emploi dans le secteur des hydrocarbures

Comme le souligne le rapport du gouvernement, plus de 10 000 emplois auraient été déjà perdus en France entre 2015 et 2017 dans le secteur parapétrolier. Suite à la crise de la Covid-19 et la chute des cours du pétrole, les licenciements vont se poursuivre, peu importe les décisions prises concernant les financements export. Continuer à parier sur des modèles économiques déjà chancelants, voués à disparaître, en espérant que ces entreprises abandonnent les énergies fossiles sans contrainte, est une illusion. Au contraire, c’est soutenir des dirigeants comme ceux de TechnipFMC qui préfèrent verser des dividendes aux actionnaires et bonus aux PDG malgré les pertes, plutôt que d’investir pour diversifier leurs activités.

Il est donc urgent d’accompagner la reconversion   des  salarié·es et sous-traitants dès aujourd’hui !

Nos demandes

Mettre fin aux subventions aux énergies fossiles

Lors des discussions sur le prochain budget et dans le cadre du plan de relance, le gouvernement et les députés doivent acter la fin de toutes les aides à l’exportation dans le secteur des énergies fossiles. En parallèle, un calendrier de suppression d’ici 2025 des aides fiscales néfastes pour le climat et l’environnement doit être adopté.

Ne plus opposer climat et emploi

Les pouvoirs publics devraient aujourd’hui s’atteler à construire une stratégie de transition juste pour les salariés impactés par la crise sur le marché du pétrole et gaz,  et anticiper leur reconversion, au lieu de soutenir à bout de bras des modèles économiques déjà chancelants, voués à disparaître.