Glyphosate et cancer : Comment l’industrie influence et manipule les média
Depuis qu'ils ont classé l'herbicide le plus utilisé au monde comme "probablement cancérigène pour les humains", l'équipe internationale de scientifiques du groupe de recherche sur le cancer au sein de l'Organisation Mondiale de la Santé fait l'objet d'attaques violentes menées par l'industrie de l'agro-chimie et ses associés.
Dans une série d’articles à la une, intitulée “Les Monsanto Papers”, Le Monde décrivait les attaques comme “une guerre du géant des pesticides contre la science” et écrivait que “Pour sauver le glyphosate, la firme [Monsanto] essayait de discréditer le Centre du cancer des Nations Unies par tous les moyens”.
Une des armes principales dans l’arsenal de l’industrie a été le rapport de Kate Kelland, une journaliste de longue date de Reuters, basée à Londres.
Avec deux scoops et un rapport spécial se basant sur les données de l’industrie, le tout soutenu par des attaques répétées, Kate Kelland avait pour objectif de provoquer un torrent d’articles critiques contre le Centre international de recherches sur le cancer (CIRC) de l’Organisation mondiale de la Santé, en décrivant l’équipe et ses scientifiques comme étant déconnectés de la réalité et manquant de sens éthique, et en les accusant d’être en situation de conflits d’intérêts et d’avoir supprimé des informations lors de leur prise de décision.
En fait, l’équipe du CIRC n’a pas mené de recherches nouvelles, mais a épluché des années de recherches publiées et vérifiées par des pairs, avant de conclure qu’il y avait des preuves limitées de cancer chez les humains lors d’expositions au glyphosate dans la vie réelle et “suffisamment” de preuves de cancer lors des études sur animaux. Le CIRC a aussi conclu qu’il y avait des preuves solides de génotoxicité pour le glyphosate seul, ainsi que pour le glyphosate utilisé dans des formulations comme celle du Roundup, l’herbicide de Monsanto dont l’utilisation a augmenté spectaculairement depuis que Monsanto commercialise ses semences modifiées génétiquement pour être “Roundup Ready” [c’est-à-dire tolérantes au Roundup].
Lors de la rédaction de son article, Kate Kelland a passé sous silence la plupart des recherches publiées qui étayaient le classement du glyphosate [comme cancérigène] et s’est concentrée sur les points de discussion et les critiques formulés par l’industrie, tout en cherchant à minimiser les analyses du CIRC. Ses articles reposent largement sur des sources favorables à l’industrie, tout en omettant de signaler leurs liens avec l’industrie. Ils contiennent aussi des erreurs que Reuters a refusé de corriger. Pour finir, certaines des informations choisies, le sont hors contexte et proviennent de documents qu’elle n’a pas mis à disposition de ses lecteurs.
Les liens de Kate Kelland avec le Science Media Center (SMC) soulèvent d’autres questions sur son objectivité en tant que journaliste scientifique. Ce centre est en effet une agence de communication à but non lucratif controversée, basée au Royaume-Uni, qui met en relation des scientifiques avec des journalistes et obtient le plus gros de son financement de groupes et entreprises industriels, y compris ceux qui ont des intérêts dans l’industrie chimique.
Comme on peut le lire dans le rapport lors de la fondation, le Science Media Center qui a été appelé “l’Agence de communication des sciences”, a été lancé en 2002 en partie pour tenter de diminuer l’impact des campagnes d’information de groupes comme Greenpeace ou les Amis de la Terre (Friends of thé Earth). Les nombreux chercheurs qui ont étudié ce groupe, ont accusé le SMC de minimiser les risques sanitaires et environnementaux de certains produits et technologies controversés.
Le parti pris de Kate Kelland en faveur de ce groupe est évident puisqu’elle apparait dans une video et un rapport qui font la promotion du SMC, participe régulièrement à des réunions d’information du SMC, intervient lors d’ateliers du SMC et participait à des réunions en Inde pour discuter de la création d’un bureau du SMC là-bas.
Ni Kate Kelland, ni ses éditeurs chez Reuters n’ont voulu répondre aux questions sur ses liens avec le SMC ou à des critiques spécifiques sur ses articles.
La directrice du SMC, Fiona Fox, a affirmé que son groupe ne travaillait pas avec Kate Kelland sur ses articles concernant le CIRC ni ne fournissait de sources au-delà de celles contenues dans les communiqués de presse du SMC. Il est toutefois évident que les articles de Kate Kelland sur le glyphosate reflètent les opinions avancés par les experts du SMC et par les groupes industriels sur ces sujets.
Reuters attaque un cancérologue
(….) Suite de l’article de FAIR
Article de STACY MALKAN paru le 24 juillet 2017 dans le site d’informations FAIR.
FAIR a pour but de “mettre en question le parti pris des media et de s’opposer à la censure, depuis 1986”.
Pour avoir l’ensemble des liens donnés dans le texte original voir : http://fair.org/home/reuters-vs-un-cancer-agency-are-corporate-ties-influencing-science-coverage/
Traduction : Christian Berdot pour les Amis de la Terre