Loi « Sécurité Globale », la dérive autoritaire en marche
Sous couvert de vouloir articuler l'action des acteurs de la sécurité en France, la loi "Sécurité globale" est le symbole d'une dérive autoritaire qui vise à museler la voix des plus précaires et des mouvements sociaux. La révélation de nouvelles violences policières a renforcé la mobilisation ces dernières semaines, partout en France.
Depuis toujours, les violences policières à caractère raciste s’abattent sur les quartiers populaires en France. Depuis plusieurs années, on assiste en parallèle à une intensification de la répression politique contre les mouvements sociaux, y compris à l’encontre des mouvements écologistes.
Quelques exemples
En 2015, lors de la COP21, des dizaines d’écologistes ont été assignés à résidence pour les empêcher de mener des actions de désobéissance civile non-violente.
À Bure, où se situe le site d’enfouissement de déchets nucléaire Cigéo, c’est également une justice politique qui est à l’œuvre. Pour museler la contestation, tout l’arsenal de surveillance et de répression est utilisé : mise sous contrôle judiciaire, écoutes téléphoniques, caméras aux fenêtres des habitations.1
Sur la ZAD du Carnet en Loire-Atlantique, des caméras cachés et illégales ont été installées pour surveiller les écologistes. 2
En 2019, ANV-COP21 a mené des actions de décrochage de portraits d’Emmanuel Macron pour dénoncer sa politique climatique et sociale. Pour ces actions, 235 personnes ont été interrogées, 128 placées en garde à vue, il y a eu 86 perquisitions, et pour l’instant 81 personnes poursuivies. Le Bureau de Lutte Antiterroriste a même été saisi.
L’État cherche à intimider, à criminaliser les mouvements sociaux. Ne le laissons pas se doter de nouvelles armes pour tuer toute opposition !
La reconnaissance faciale en temps réel grâce à des caméras portables et la surveillance par drones sont particulièrement intrusives ; elles menacent la liberté d’expression et la liberté de réunion, qui sont fondamentales.
La possibilité de filmer les forces de l’ordre pour documenter les violences est nécessaire au contrôle démocratique de l’institution policière. Donner une excuse en plus aux policiers pour nous empêcher de filmer, c’est cautionner les dérives dont nous faisons régulièrement l’expérience lors de nos actions ; les exemples sont nombreux, trop nombreux. Et nous ne sommes pas les seules victimes de ces abus, loin de là.
Ça n’est pas l’article 24 qu’il faut réécrire, c’est toute la proposition de loi qu’il faut abandonner. 3 Elle est dans son ensemble l’expression d’une grave dérive autoritaire, et des députés censés agir dans l’intérêt du peuple devraient s’en apercevoir.
La République en Marche se moque de nous, en feignant aujourd’hui de reculer sur un article, alors que le 9 décembre sera examiné un projet de loi qui en contient un similaire. 4
Le gouvernement se moque de nous, en se servant de cette proposition de loi comme d’un épouvantail pour détourner notre attention de la crise sociale et environnementale qui nous heurte de plein fouet, pour éviter que nous ne lui demandions des comptes.
Il manipule les thèmes et les thèses de l’extrême-droite, quitte à transformer la France en régime sécuritaire, simplement parce qu’il refuse d’accepter la situation dans laquelle nous sommes, qui appelle des réformes profondément sociales qui vont à l’encontre de son projet néolibéral.
La loi “Sécurité globale” n’a rien de pertinent, et les exemples utilisés par ses défenseurs sont tous déjà traités par le droit actuel.5
Alors, deux possibilités : soit les députés ne sont pas compétents (c’est embêtant), soit ils le font exprès (c’est problématique).
Cette proposition de loi est indigne et contraire aux fondements de notre démocratie. C’est la liberté de militer et de manifester qui est en danger : étouffer tout mouvement contestant l’ordre établi revient à entériner une dérive autoritaire dont nous ne reviendrons pas indemnes.
Elle doit être retirée. Mobilisons-nous partout en France !
Article Reporterre : « La justice a massivement surveillé les militants antinucléaires de Bure«
Article Reporterre : « Au Carnet, des caméras cachées et illégales pour surveiller des écologistes »
La Quadrature du Net – « 160 organisations contre la loi Sécurité globale«
Dalloz actualité : « Documenter l’action de la police : état des lieux et perspectives«