Méga-projet pétrolier de Total en Ouganda : une décision de justice décevante
En octobre, aux côtés de cinq autres associations, nous avions lancé une action en justice historique contre Total. L’objectif ? Dénoncer et empêcher des violations aux droits humains et les risques que fait peser le méga-projet pétrolier de la multinationale sur l'environnement et le climat, en plein coeur d’un parc naturel en Ouganda.
En quoi la décision rendue est-elle une mauvaise nouvelle ?
Ce 30 janvier, le Tribunal de Grande Instance vient de rendre sa décision suite à l’audience du 12 décembre dernier : il se déclare incompétent et estime que l’affaire devrait être portée auprès du Tribunal de Commerce, reprenant ainsi l’argumentaire des avocats de Total. Ainsi, il faudra encore attendre plusieurs mois pour obtenir une prochaine décision. Pourtant, les violations aux droits humains en Ouganda continuent et les pressions du gouvernement sur les leaders des communautés affectées sont très fortes. C’est pourquoi nous envisageons aux côtés de nos partenaires de faire appel de cette décision.
Pour faire pression, agissez à nos côtés et soutenez l’action en justice
Une demande de mesure d’urgence face à la gravité de la situation sur place
Au vu de l’urgence sociale et environnementale de la situation en Ouganda, nous avions décidé l’année dernière d’entamer une procédure juridique d’urgence, afin d’obtenir une audience le plus rapidement qui aurait pu contraindre Total d’agir très vite sur le terrain. Le tribunal de Nanterre s’étant déclaré incompétent, il n’a pas jugé le fond de l’affaire : cette décision ne contredit donc en rien les accusations que nous portons à l’encontre de Total, mais empêche que les violations des droits humains s’arrêtent aujourd’hui. … et ce au détriment des milliers d’habitant·e·s sur place qui ne peuvent déjà plus cultiver leurs terres alors qu’ils n’ont pas reçu de compensations pour survivre.
Une décision aux conséquences plus larges que l’affaire Total en Ouganda
Il faut savoir que cette décision de justice est la toute première qui se base sur la loi sur le devoir de vigilance, promulguée en 2017. Cette loi, arrachée après des années de combat aux côtés d’autres organisations de la société civile, visait à une régulation plus forte des activités des multinationales françaises et de leurs sous-traitants et fournisseurs partout dans le monde, avec une obligation de publication et mise en oeuvre effective de “plans de vigilance”, c’est-à-dire des mesures pour prévenir les atteintes graves aux droits humains et à l’environnement.
Fin de cavale pour les multinationales ? D’une loi pionnière en France à un traité à l’ONU
Cette décision de justice revêt donc une importance capitale, puisqu’elle impactera les prochaines affaires se basant sur cette loi (et fera donc office de « jurisprudence »).
En quoi nous contestons la décision des juges ?
Selon les juges, la publication d’un plan de vigilance relèverait de « contestations relatives aux sociétés commerciales ». Ils estiment ainsi que le Tribunal de Commerce est le seul compétent pour juger cette affaire, bien que les demandeurs (c’est à dire les Amis de la Terre et ses partenaires) ne soient pas des commerçants.
Pour nous, cette interprétation de la loi est erronée. Le tribunal de commerce est une juridiction d’exception créée principalement afin que les commerçants rendent justice pour les litiges entre commerçants. Ici, il est question de graves atteintes aux droits humains et à l’environnement. Il apparaît donc totalement irréaliste de considérer que le tribunal de commerce est la juridiction adaptée pour obliger Total à prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à ces atteintes.
Nous restons plus que jamais mobilisés pour contraindre Total d’agir. Pour vous mobiliser, soutenez l’action en justice !