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Zéro Artificialisation Nette : une ligne à tenir
La lutte contre l'artificialisation des sols est au carrefour de multiples enjeux écologiques : préservation de la biodiversité et des terres agricoles, lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, prévention face aux risques naturels, etc. Or, la trajectoire ZAN est menacée par plusieurs évolutions juridiques.
Le ZAN, qu’est-ce que c’est ?
Introduite par la loi Climat et Résilience en 2021, la trajectoire « Zéro Artificialisation Nette » (ZAN) constitue une obligation de résultat bienvenue dans le droit français. Elle oblige les collectivités locales à réduire drastiquement leur consommation d’espaces naturels agricoles et forestiers dès à présent, en fixant à la plupart des régions un objectif précis (-50 % sur la période 2021-2031 par rapport aux dix années précédentes), puis à poursuivre leurs efforts de façon à atteindre une absence d’artificialisation nette en 2050.
Une ambition à préserver
Aujourd’hui, la trajectoire ZAN dérange beaucoup d’élus locaux, raison pour laquelle une proposition de loi consistant à la vider de sa substance a été déposée au Sénat et sera examinée en première lecture le 18 février. Sur son site internet consacré à la mobilisation citoyenne pour la défense du ZAN, une adhérente des Amis de la Terre, professionnelle de l’urbanisme en Occitanie, nous invite à agir en adressant une lettre pré-rédigée aux parlementaires.
La gestion des Projets d’Envergure Nationale ou Européenne, une entorse au ZAN
La loi Climat et Résilience oblige chaque région dotée d’un SRADDET (Schéma Régional d’Aménagement, de Développement Durable et d’Égalité des Territoires), c’est-à-dire toutes à l’exception de l’Ile-de-France, de la Corse et des DOM-TOM, à réduire leur consommation d’espaces naturels agricoles et forestiers de 50 % sur la période 2021-2031 par rapport aux dix années précédentes. Les régions non dotées de SRADDET doivent également fixer un objectif de baisse dans leurs documents de planification régionale, mais de façon plus libre que les autres.
Suite à une action de lobbying de certain·es président·es de régions, dont les territoires, contrairement à d’autres, sont concernés par des projets majeurs et soutenus par l’État (tels que de grandes infrastructures de transport), la loi du 20 juillet 2023 de mise en œuvre du ZAN a introduit un dispositif en vertu duquel les surfaces consommées par les projets dits d’ « envergure nationale ou européenne » seront comptabilisées non pas à l’échelle régionale, mais à l’échelle nationale. Cette mutualisation prend la forme d’une enveloppe de 12 500 hectares à l’échelle de la France entière, dont 10 000 hectares pour les 11 régions dotées d’un SRADDET, ayant pour effet de réduire d’autant l’enveloppe pour les projets d’envergure locale (habitat, zones artisanales…) mais dans des proportions identiques d’une région à l’autre. Quant à la qualification du statut de « Projet d’Envergure Nationale ou Européenne », elle résulte de l’inscription sur une liste fixée par un arrêté ministériel qui doit être actualisé annuellement afin de prendre en compte l’abandon de projets ou, inversement, l’arrivée à maturité de nouveaux projets.
A priori, rien d’aberrant, à condition que le total des projets recensés respecte bien le plafond fixé par la loi. Ceci est d’autant plus important que la loi précise explicitement qu’en cas de dépassement (autrement dit, si ces grands projets consomment plus d’espaces naturels agricoles et forestiers que prévu), le surcroît ne pourra pas être imputé sur les enveloppes des collectivités locales. Concrètement, si par exemple en Occitanie les deux projets de lignes à grande vitesse consomment plus d’espaces naturels que prévu, cela ne diminuera pas l’enveloppe de consommation d’espaces naturels agricoles et forestiers dans la région pour les projets de moindre envergure.
Or, au regard des informations disponibles sur les surfaces d’espaces naturels agricoles et forestiers qui seraient consommées par quelques Projets d’Envergure Nationale ou Européenne, et notamment les plus importants d’entre eux, le plafond fixé par la loi est largement dépassé.
C’est pourquoi, aux côtés de Notre Affaire à Tous et de Terres de Luttes, les Amis de la Terre France sont engagés dans un contentieux visant à faire annuler l‘arrêté ministériel du 31 mai 2024 fixant la liste des Projets d’Envergure Nationale ou Européenne.